Karuli - happy misfortune

Tu verras dans quelques jours. On s'y habitue vite. Ah ça, je voulais bien le croire. Enfin, je ne savais pas trop, j'avais toujours eu l'habitude des problèmes d'argent, du coup je ne pourrais pas me mettre à dépenser sans compter du jour au lendemain. Je n'étais même pas sûr de le pouvoir un jour. À mes yeux, l'argent avait énormément de valeur, même une petite somme. Loeiz était tout mon inverse sur ce point, il avait toujours chercher à trouver de l'argent par lui-même, afin de pouvoir faire ce qu'il avait envie, sans demander à nos parents. Peut-être... peut-être qu'elle ira déjà beaucoup mieux si elle apprend que tu n'es pas mort. Enfin... que je ne suis pas mort. Je restai silencieux plusieurs instants, regardant distraitement le plafond. Su Ji avait toujours adoré Loeiz, pourquoi, je ne le savais pas, mais elle le collait le plus souvent possible. Ils me manquent tellement. Évidemment ce n'est rien comparé à quel point c'était dur de vivre sans toi, mais ils me manquent quand même.... Je ne les avais pas vu depuis juillet 2015, je n'avais pas eu de leurs nouvelles, je ne savais pas si tout allait bien à Marseille. [b]P'pa aussi me manque, mais lui, il n'y a aucun moyen de le revoir de notre vivant...[/color] La justice était injuste. Fichue erreur judiciaire.

Subtilement -du moins tu espérais que c'était assez subtil- tu avais glissé le fait que tu voudrais bien qu'Az revoit votre famille. En réalité, tu voudrais que ça se fasse oui, mais beaucoup plus tard. Tu venais juste de le retrouver, tu voulais le garder pour toi tout seul le plus longtemps possible. Mais d'un autre côté, tu sais que votre famille aussi a beaucoup souffert de sa mort... de ta mort... bref de votre mort à tous les deux, c'est plus simple. Apprendre que vous étiez toujours tous deux en vie ferait beaucoup de bien à Su Ji. Et à Hyo Ryn. Et à votre mère aussi, vu que Az a toujours été son préféré. Mais surtout à Su Ji. Seulement, tu ne sais pas ce que ton frère a en tête, s'il a envie de ressusciter ou pas. Tu hésites à en parler clairement. Mais de toutes façons, il y avait le temps de parler de tout ça plus tard. Ils me manquent tellement. Évidemment ce n'est rien comparé à quel point c'était dur de vivre sans toi, mais ils me manquent quand même.... Caressant distraitement ses cheveux, tu confirmes. Rien n'est comparable à la vie sans lui. Lui, tu ne peux plus le voir mais les autres eux sont toujours vivants. Et ils seraient extrêmement heureux de te voir à nouveau. Toute une autre machine sera enclenchée si jamais tout le monde apprenait qu'en fait vous êtes toujours vivants. Une véritable révolution. Peut-être même un peu trop grande pour vous.

Lui, tu ne peux plus le voir mais les autres eux sont toujours vivants. Et ils seraient extrêmement heureux de te voir à nouveau. Je soupirai longuement. Si seulement... Quand on a grandi en étant très proche de sa famille, surtout quand c'est une famille nombreuse, être séparé d'eux si brutalement et pendant si longtemps était insupportable. Évidemment, on finissait par s'y habituer. Très lentement, mais à partir d'un moment la séparation faisait un peu moins mal. Par contre, pour Loeiz, jamais la douleur ne s'était estompée. On avait toujours été tous les deux, on s'était développés ensemble, on était nés en même temps, à quelques minutes d'écart. En primaire on était dans la même classe, on ne se lâchait jamais. J'eus envie de lui demander pourquoi il s'était fait passer pour moi, mais abandonnai l'idée. Le connaissant, c'était parce qu'il était persuadé que notre mère me préférait, car j'étais le plus intelligent. C'était n'importe quoi, mais je ne pouvais rien faire pour lui prouver qu'il a tort. Mais... je ne suis pas sûr que ça serait une bonne idée..., murmurai-je en me souvenant qu'il y avait un risque que cette fois, je meurs pour de vrai. Penser son fils mort et apprendre que c'était faux pour ensuite le perdre pour de bon, ça devait être insupportable...

Tu n'en es pas sûr non plus que ce soit une bonne idée. Sans même lui demander, tu sais qu'il dit cela en pensant à son état de santé. Vous avez toujours eu cette sorte de connexion, ce truc de jumeau qui fait que l'un ressent les émotions profondes de l'autre parfois. Un lien que tu aimes particulièrement. Quand Az avait été déclaré mort, tu avais pensé que ça n'avait peut-être jamais existé et que c'était tout une fiction de ton imagination, ou alors que des coïncidences. Parce que s'il était vraiment mort, tu l'aurais senti. Et ce ne fut pas le cas. Ce soir, les choses prenaient leur sens. Normal que tu n'es rien ressenti, le gars était toujours vivant. On aura le temps de réfléchir à tout ça plus tard, dis-tu d'une voix distraite. Vous avez le temps, oui. Rien ne presse. Ou plutôt si. Mais ta priorité en ce moment, c'est sa santé. Tu regardes le ciel qui commençait lentement à s'éclaircir. L'heure avait filé à une vitesse folle. Il serait peut-être temps de se coucher et reprendre des forces pour le matin. Mais tu sais déjà au fond de toi que c'était mort, tu ne dormiras sûrement pas. Trop d'émotions pour une seule soirée, même le sommeil ne t'aidera pas à gérer ça.

On aura le temps de réfléchir à tout ça plus tard. On aura le temps. Mon Dieu, depuis combien de temps n'avais-je pas réellement eu tout mon temps pour faire quelque chose ? Longtemps. Et en plus, longtemps sans Loeiz, c'était trèèèèès long. Même l'attente de mes résultats, que ce soit scolaires ou médicaux, ce n'était pas plus long qu'une journée sans lui. Rien n'était plus long que son absence.  On a tout notre temps maintenant, on ne se perdra plus jamais, dis-je en baillant. Mon regard se posa sur la vitre. Oh, il commence à faire jour... Il était déjà si tard ? Ou tôt, vu l'heure... Enfin c'était la même chose. Je commençai à fatiguer, d'un coup. Peut-être le fait d'avoir pris conscience qu'il était si tard. Lentement, je sentais mes yeux commencer à se fermer.

Tu le regardes, riant du fait qu'il dise une aussi belle phrase en baillant grandement. Moi je ne sais pas, mais toi on te perd déjà là . Il faisait déjà jour, oui. Dieu merci tu n'avais rien prévu pour la matinée sinon, c'était mort. Impossible pour toi d'être sur pied si tu n'as pas bouclé au moins huit heures de sommeil fermes. Tu regardes ton frère, qui commençait doucement à s'endormir. Tu caresses doucement ses cheveux, t'émouvant de l'instant. Il représentait tellement pour toi. Beaucoup plus que tu ne pouvais l'exprimer avec des mots. Si tu pouvais l'épouser tu le ferais. Endormi comme ça sur tes genoux, il avait l'air si fragile, si vulnérable. Tu as envie de construire un énorme mur autour de lui, que plus rien ni personne ne vienne encore te l'enlever. Qu'il soit à toi pour toujours. Mais c'est impossible à priori. Hé Maknae, on va dodo, debout, le réveilles-tu doucement. Tu l'entraînes jusque dans ta chambre en éteignant tout au passage, tu le couches sur ton lit avant de te coucher à côté de lui, trop fatigué pour faire quoi que ce soit d'autre. Te serrant tout contre lui, tu l'entoures de tes bras avant de lui déposer un baiser sur la nuque. Saranghae... murmures-tu doucement avant de te laisser aller au sommeil.