Une rencontre en apesanteur (Sparkles)

Assis sur ce brancard depuis plusieurs heures, tu t'impatientes. Parce que tu as autre chose à faire que de rester. Bon, c'est vrai, tu n'as rien à faire mais tu en as marre d'être là, à attendre ses fameux résultats et tes radios. Mais au moment où tu allais demander à une infirmière pourquoi ça prenait autant de temps, le médecin s'avance vers toi.

- Bon, tout va bien. Il n'y a rien de cassé, ce qui est une bonne nouvelle. C'est juste une petit foulure de rien du tout. Par contre, vous devrez porter une attelle pendant une semaine et ne pas forcer sur votre main gauche.

Après t'avoir expliqué deux-trois choses à faire et ne pas faire, il part, te laissant aux soins d'une infirmière. Et te voilà parti en direction de la sortie. Tu empruntes l'ascenseur pour rejoindre le parking. Une jeune femme est déjà là. Plus jeune que toi, un look assez spécial mais peu importe, ce n'est pas ton genre. Et puis, de toute façon, tu as bien une personne en tête et dans ton cœur donc tu ne te sens pas l'âme d'un dragueur en ce moment. Sauf pour elle. Alyson. Elle et rien qu'elle. Tu veux la reconquérir plus que tout. Tu te concentres de nouveau sur la réalité quand l'ascenseur se bloque.

- Eh merde ! Souffles-tu.

C'est pas le moment de s'arrêter aussi près du but. T'étais presque arrivé au parking. Tu appuies sur la sonnette d'urgence et tu n'as plus qu'à attendre.

Aujourd'hui, je n'étais genre pas d'humeur du tout. J'avais la rage, j'étais triste, j'avais juste envie de cogner sur quelque chose ou alors de plonger ma tête sous ma couette pour ne plus jamais en ressortir. Et pour cause.

Ce matin en regardant les nouvelles, j'avais appris la mort d'un petit garçon de 4 ans qui venait de succomber aux suites d'un grave accident dans le centre-ville. Le petit avait perdu beaucoup de sang et il lui fallait une transfusion pour pouvoir s'en sortir. Malheureusement l'hôpital n'en avait plus et avant que la banque de sang n'en envoie, l'enfant était parti. Je ne suis pas du genre sentimental, bien au contraire, mais apprendre cette nouvelle de bon matin m'avait totalement démoralisé. Il était de groupe AB-, le plus rare au monde. Le mien. Si j'avais eu l'habitude de donner régulièrement mon sang, peut-être que ce gamin aurait pu en bénéficier. Peut-être qu'il serait encore en vie actuellement.

C'est pour ça que j'ai trouvé un créneau dans ma journée pour venir faire don de mon sang. L'infirmière avait dit que plusieurs personnes avaient réagi de la même manière que moi aujourd'hui. J'ai souri, rassurée à l'idée de penser que le monde était encore capable d'actes généreux.

J'étais dans l'ascenseur mais je n'y étais pas vraiment. Tout ce que je voulais c'était rentrer chez moi. Un homme me rejoint et les portes se referment. J'espère que plus personne ne sollicitera l'ascenseur jusqu'à ce qu'on descende. Plus vite je serai dans mon lit, mieux je porterai.

Je jette un coup d’œil à l'homme à côté. Il est plutôt mignon. Un peu plus âgé que moi par contre. Il n'avait pas un visage particulier et pourtant, je jurerai l'avoir déjà vu quelque part. Peut-être à New-York. Ou alors ici même à Vancouver, ce qui serait plus probable. J'ai bien envie de lui demander mais je me ravise au dernier moment. Pas envie d'engager une conversation qui pourrait s'éterniser. S'il s'avère être un grand bavard, j'aurais juste envie de l'étrangler. Et vu mon humeur actuellement, il ne valait mieux...

Un bruit sourd m'arrêta dans mes pensées. Mais qu'est-ce-que... ?

« - Non c'est pas vrai, dites-moi que c'est une blague ! »

L'ascenseur venait de se bloquer. J'étais bloquée dans un ascenseur. Une expérience que j'ai toujours voulu faire mais qui tombait vraiment au pire moment de ma vie. Vraiment cette journée était maudite.

« - Putain, ce n'était vraiment pas le moment de me faire ce coup là ! »

L'homme qui était là n'était apparemment pas ravi de la situation lui non plus. Je l'ai entendu jurer avant d'appuyer sur le bouton d'urgence.  Ouais... plus je le regardais, plus j'avais cette impression de déjà-vu. Mais maintenant que j'avais tout le temps pour y penser, peut-être que ça me reviendra.

La loose totale. Etre bloqué dans un ascenseur, alors que tu es attendu, te rend encore plus énervé. Mais en regardant ta « partenaire », tu te dis qu'au moins, tu n'es pas tout seul. C'est déjà un soulagement.

- Je crois que ce n'est pas notre jour de chance, balances-tu à la jeune femme à tes côtés.

Tu l'as vue s'énerver et tu n'as pas pu t'empêcher de sourire face à son comportement. On dirait toi mais au féminin. Vous faites la paire dans cet ascenseur bloqué.

- Je m'appelle Han, dis-tu, en lui proposant ta main.

Tu t'es calmé en un rien de temps. Rien qu'en la regardant. C'est étrange. Personne, à part Alyson, n'avait réussi à t'apaiser.

- Autant patienter en discutant, non ? Demandes-tu, alors qu'elle regarde ta main d'un air suspicieux.

Tu laisses tomber et tu appuies de nouveau sur le bouton d'urgence, espérant qu'ils ne seront pas long à répondre.

- J'espère qu'ils ne seront pas long pour répondre. J'ai pas que ça à faire, lances-tu.

Tu espères qu'elle parlera. Même un peu.

Et donc malgré le fait que j'ai croisé les doigts au point de les écraser, le pire était arrivé: mon cher compagnon s'était mis à parler. Il ne voulait plus s'arrêter, ça partait dans tous les sens. Et le fait que je ne pipe mot ne semblait même pas le décourager.

Je continue de le regarder, beaucoup plus pour essayer de me rappeler son visage que par réel intérêt pour ce qu'il dit. Mais quand même, je dois avouer qu'il a une très belle voix grave. Sexy, poli et une belle voix; l'homme parfait existait peut-être finalement. Han, pensai-je. Par contre le prénom est pas terrible. Pauvre de lui qui doit trimballer ces 3 lettres toute sa vie.

Il se détourne pour rappuyer sur le bouton de secours après que je l'ai laissé poireauter avec sa main en l'air comme un con. Il semble irrité, il doit se sentir bien bête maintenant. Et puis zut ! Il n'y est pour rien si je suis de mauvaise humeur. Et ma foi, une petite conversation platonique ne me tuera pas.

« - Je... Je suis Sparkles. Désolée si je ne suis pas la partenaire d'asensceur idéale mais comme vous l'avez dit vous même, ce n'est pas mon jour aujourd'hui. »

Je préfère ne pas entrer dans les détails et je dévie rapidement la conversation.

« - On se connait, n'est-ce pas ? Et non, ce n'est pas une technique de drague pourrie, je suis vraiment sûre de vous avoir déjà croisé quelque part. »

Je me connais et je sais que tant que je n'aurai pas mis un endroit sur ce visage, je ne serai pas tranquille. Autant le mettre lui aussi dans ma torture.

Elle te fait rire. De la voir réagir comme ça. Tu la trouves légèrement étrange mais charmante. C'est vrai quoi ? Tu n'aurais pas Alyson dans le collimateur, tu aurais pu tenter quelque chose avec la jolie blonde.

- Pas de soucis. Je peux comprendre que vous vouliez rester seule. C'est pas un soucis.

Si elle le souhaite, tu peux la laisser tranquille. Tu vas pas pousser quelqu'un à discuter avec toi, si elle a pas envie. Et puis, tu ris d'un rire franc face à sa dernière remarque. La technique de drague serait réellement pourrie si c'était ça. C'est le genre de truc que tu utilises dans les séries ou les films dans lesquels tu as joué.

- Vous m'avez peut-être vu à la télé ou au cinéma. J'ai joué pas dans mal de séries et de films, dis-tu, en haussant les épaules.

Ça devient une habitude que les gens te reconnaissent. T'es acteur, c'est normal. Bon, t'es pas aussi connu que certains mais ta petite notoriété te plaît. Bon, t'aimes pas te la péter par rapport à ça. Mais, ça fait toujours son charme devant les filles. Quoique … quoique avec cette jeune femme, Sparkles (nom étrange au passage), tu penses que ça lui passera totalement au-dessus.

« - C'est difficile de dire qu'on veut rester seule quand on est bloquée dans un ascenseur avec un canon super sexy. »

Osé mais osef. On me reproche toujours de dire tout ce qui me passe par la tête sans filtres. Bah moi je le dis et j'assume. Pourquoi garder les choses alors qu'on les pense ? Ça lui fera sûrement plaisir de savoir que je le trouve mignon alors je ne vois pas pourquoi je me tairai. Et puis il rit. Je le fais rire alors c'est déjà ça. En plus il a un rire sexy, qui colle bien au personnage. Mouais... décidément, je ne regrettais pas de l'avoir ouverte.

« - Oh mais c'est que monsieur me joue déjà sa star, ma parole. » répliques-tu en riant.

Tu voyais bien qu'il ne se prenait pas la tête à le dire mais ça te faisait marrer quand même. Toutes les stars ont ce petit égo ou orgueil je dirai qui les poussent toujours à faire leur intéressant. Chez certains, ça devient carrément la grosse tête au bout d'un moment et dans ces cas là, j'ai juste envie de leur foutre une bonne raclée. Heureusement pour lui, sexy Han ne semblait pas encore atteint à ce point.

« - Vous avez jouer dans quels genres comme films ou séries ? Je suis pas vraiment cinéma mais c'est possible que ce soit ça. »

Et puis j'ajoute, provocatrice:

« - Ah moins que ce ne soit dans un porno. »

Je ne regarde jamais de porno parce que je trouve ça dégueu. Mais ce Han a le don de me faire dire des choses pour le provoquer et rare sont les personnes qui ont cet effet sur moi. J'aime bien ça. Je l'aime bien ce gars.

Sa remarque te fait sourire. Elle a pas tort. Pas sur le fait que tu sois super sexy parce que tu ne penses pas l'être. Enfin, tu sais que tu plutôt pas mal mais de là à dire « canon super sexy », elle est peut-être allée un peu loin, non ? Bref. En tout cas, elle n'a pas tort sur le fait de rester seule quand on est coincé avec d'autres personnes.

- C'est pas faux ! Lances-tu. Ils ont pas l'air de se bouger le cul en tout cas, dis-tu en montrant le bouton d'arrêt d'urgence.

Tu t'impatientes parce que tu as des choses à faire. Et que « le temps, c'est de l'argent » comme le diraient certains. Bon, tu sais que ce n'est pas de leur faute – enfin pas réellement – mais t'aimerais bien rentrer chez toi et avancer.

- Je ne suis pas une star, non. Loin de là, souris-tu. Certaines personnes me reconnaissent mais ça s'arrête là.

T'aimes bien ton boulot mais le reste t'énerve au plus haut point. Les paparazzis, les interview, les fans, tout ça, pour toi, reste du superflu.

- J'ai pas mal jouer dans des policiers, des thrillers et de la science-fiction. Un peu de comédie de temps à autres, histoire de varier un peu mais c'est pas trop mon truc.

Tu exploses de rire. Elle a une de ces façons de te parler que tu aimes énormément. Acteur porno ? Sincèrement, tu n'y as jamais pensé mais tu aurais pu y « sombrer », si tu avais été au plus mal financièrement. Et encore, même en étant au plus bas, tu aurais trouver une autre solution. Travailler, par exemple. Tu ne sais pas dans quoi mais tu auras fait un « vrai » job.

- Je ne suis pas le sosie de Rocco Siffredi, dis-tu en souriant. Mais sans déconner, j'ai jamais fait de porno de ma vie et je ne pense pas que cela arrive un jour.

Il avait raison sur ce point en tout cas, l'équipe de secours n'a pas l'air de vouloir se bouger le cul. Pas que le mec ne soit pas d'une agréable compagnie, loin de là, mais disons que j'aurais aimé le rencontrer un autre jour pour mieux savourer ce moment. Parce que là, j'avais juste envie de rentrer me coucher.

Sa remarque me fait sourire. Ouais, il ne se prend pas la tête avec sa vie de célébrité, exactement comme je l'avais imaginé. Et il me cite ses genres de films et je suis de plus en plus persuadé que ce n'est pas à la télé que je l'ai croisé.

- Ah non, pas de porno ? Dommage, je vous aurais bien vu faire sa fête à une jolie brunette moi. Tout ce muscle en action... le spectacle doit en valoir le détour.

Et j'étais sérieuse en plus. Vraiment, qui ne voudrait pas se faire culbuter par cet apollon ? Moi je ne dirai pas non, perso. Et l'apparente différence d'âge ne me dérangerait pas du tout, bien au contraire. Mais bon, je préfère qu'il reste un fantasme et rien de plus. Quoique...

- Vous avez une copine ? Elle serait fâchée si je vous embrasse là tout de suite ?

J'ai posé la question comme si c'était la chose la plus naturelle au monde et j'étais très curieuse de savoir comment il réagira. Je ne suis pas sûre que je l'embrasserai mais une chose est sûre, j'aime le provoquer, je me sens super bien avec lui. Et quand on me connait, on sent que c'est très rare ce genre de sensation chez moi.