just need you, right now ! (stanislas - 6)

Je suis sous tension. Tous mes muscles sont tendus et seuls tes caresses parviennent à les détendre. C’est l’effet bienfaisant que tu as toujours eu sur mon être durant mes périodes de doutes ou de frustration. Du moins, lorsque je te laisse t’approcher, car je demeure incroyablement fier et cela m’est particulièrement difficile d’être faible. Je déteste cette sensation-là, mas pourtant, elle s’impose à moi à cet instant. Lorsque tu agrippes ma main, mon premier réflexe et de m’en dégager, car ce geste me semble bien trop intime, mais je le retiens, car en fin de compte, j’en ai cruellement besoin à cet instant. On rejoint la cafeteria, se pose à une table avant que tu ne t’éloignes pour prendre notre commande. Je t’attends patiemment de façon nerveuse. Je joue avec mes doigts. Je les sens trembler face aux doutes qui m’assaillent, mais tu finis par me rejoindre. Je te laisse prendre place face à moi. « Merci. » Je murmure avec fébrilité avant de glisser mes mains sur mes cuisses. Elles sont moites. « Merci d’être là. » Je déclare en venant planter mon regard brillant dans le tiens. Cela est important pour moi. Plus que tu ne l’imagines.

Quand je dépose nos boissons sur la table et que je me s'assois près de toi, j'entends des paroles pleines de tendresses et de reconnaissance. Je suis profondément touché, bouleversé par tes remerciements. Ça vaut de l'or quand ça traverse ta bouche, et ton double merci me réchauffe le cœur. "Toujours là pour toi Lip." J'espère que tu en as conscience. Je viens chercher ta main contre ta cuisse, je sens qu'elle est moite mais je continue de la serrer. "Allez bois un peu. Du sucre te fera du bien."

Ta présence est source de plénitude pour moi. Je le camoufle aisément, mais je serai dans un pire état si tu n'étais pas là. Je pense vraiment que j'aurai tout cassé au lieu de m'asseoir sagement à une table, car j'ai du mal à contrôler mes nerfs. Je sais que je n'ai pas à t'exprimer ma gratitude, mais je ne peux que le faire à cet instant. Je veux que tu le saches. Tu viens chercher ma main sous la table. Je te laisse faire, bien que ce geste me trouble. Je hoche la tête à tes propos et vient boire une gorgée de ma tasse. Je laisse le liquide chaud réchauffer mes membres. Je te souris simplement. "Et si les nouvelles sont mauvaises. Qu'est-ce que je vais faire ? C'est la seule famille qui me reste." Je t'expose l'inquiétude qui me hante. J'ai si peur de la perdre.

J’attrape ta main pour la serrer de la mienne et t’apporter de la douceur à travers ce geste amical. Je veux sentir tes nerfs détendus, te voir plus serein. « Si les nouvelles sont mauvaises, on avisera. Mais pour le moment tu n’as encore aucun résultat, alors ne te tracasse pas d’avance. » Tu bois une gorgée du chocolat chaud. « Et je suis ta famille. » Je te considère comme un frère en tout cas. Tu t’es mis un peu de lait au coin de ta bouche, alors je viens le retirer dans un geste tendre, avec un sourire collé aux lèvres. Tu es tellement adorable quand tu t’y mets…

J'explose mes angoisses, car je ressens le besoin profond de les exprimer. Elles rongent ma poitrine avec tant de force que je ne peux pas faire autrement. Mon coeur suffoque à l'idée de perdre ma soeur, mais tu t'efforces de me rassurer. J'essaye de t'écouter, mais cela m'est difficile. Mes doigts tremblent tout de même, bien que je m'efforce de boire ce chocolat que tu m'as apporté. Tes paroles m'arrachent un sourire. Je le sais, mais ce n'est pas vraiment la même chose. Seulement ton action me surprend et je te sonde du regard, l'air penaud. Mon coeur rate un battement alors que je murmure. "Tu n'es pas que ça, tu le sais bien." Je souffle en venant boire de nouveau mon chocolat comme si de rien n'était, comme si cette révélation était normale.

Je tente d’atténuer la rage qui gronde en toi, mais surtout cette angoisse profonde et peu habituelle qui éclate avec virulence au creux de tes entrailles. Elle est si peu ordinaire que tu ne parviens ni à la contrôler ni à la gérer, te laissant ainsi animer par ces émotions négatives. Elles obscurcissent toutes tes pensées, ton cœur également se fait ronger. « Je le sais, toi non plus tu n’es pas que ça. » Je commente avec douceur en te regardant boire ton chocolat chaud. Ta révélation me bouleverse mais je ne t’indique pas mon trouble. Il transparaît au fond de mes prunelles. Je glisse finalement mon portable de ma poche, j’allume un jeu et je le dépose devant toi. « Tu essayes de battre mon record ? » Je te souris pour te divertir, tentant de te détourner de ton désespoir le temps d’attendre un résultat – ou au moins un signe du médecin analysant ta sœur.

Je ne sais pas moi-même ce que je sous-entends par cette révélation que je te fais. Seulement le terme de « famille », ne me semble pas suffisant pour exprimer la nature exacte de notre relation ou même de l’affection que je te porte. Je suis incapable de réfléchir à tout cela de toute manière et il est mieux de ne pas le faire. Je préfère juste me nourrir de ta douceur naturelle, parce que j’en ai besoin à cet instant. Mes nerfs demeurent à fleur de peau, mais je n’ai plus cette envie de tout cassé. Je ne commente pas ta réponse. Je me contente juste de sourire sans relever mon regard pour t’observer. Je n’ai pas de doutes sur tes propos, l’affection que tu me portes. La preuve, tu demeures là, alors que mes réactions sont parfois en totale contradiction. Je suis trop dépendant de toi pour te tenir éloigné de moi, même si je refuse de l’admettre. Tu me tends ton téléphone pour me changer les idées et je le prends sans un mot, jouant à ce jeu débile qui est de sauter en tapant l’écran pour ne pas tomber dans le vide. Mes doigts tremblent trop et malgré tous mes efforts, je ne fais que perdre. Cela m’agace, je rage entre mes lèvres. « Laisse-tomber, il est nul ce putain de jeu. » J’inspire profondément en te rendant ton téléphone avant de replonger mon regard dans ma tasse. Je tape des pieds. « Ils en mettent du temps, bon sang. » Je m’insurge en venant relever mon regard perdu dans le tien. Cette attente est interminable. Plus ça dure, plus les nouvelles sont mauvaises. Elles le sont toujours quand le silence règne lorsqu’on demande des nouvelles. Cela me rend dingue.

Je t’invite à te détendre sur mon portable pour me battre à un jeu, et si j’ai la sensation que l’idée fonctionne durant quelques minutes, à voir tes nombreux essais et ton air déterminé, je me retrouve frustré. Tu abandonnes la partie, tu me tends le téléphone d’un air blasé, avant de mettre en avant ton impatience. Je reprends ta main dans la mienne, soutenant ton regard du mien, plein de douceur et de compassion. « Ils vont finir par arriver. » Je ne sais plus quoi faire ou dire, j’ai épuisé tout le stock des solutions.

Tu reprends ma main dans la tienne et nos regards se soutiennent. Une fois de plus, tu fais preuve de patience et tente de me rassurer, mais je crains d’arriver à mes limites. Je le sens dans ma manière de taper le sol avec mon pied ou les tremblements qui envahissent mon corps. J’ai besoin de décompresser, car je suis à deux doigts de craquer de nouveau. « Je vais fumer. » Je lâche en venant me relever. Je romps le contact avec tes doigts, me dirige de nouveau vers la sortie, car c’est le seul moyen à ma disposition pour ne pas péter une durite dans de telles circonstances, mais alors que je passe la porte, suivie de près par toi, je vois une infirmière se rapprocher de moi. « On vous cherchez, Monsieur Suarez. Votre sœur est sortie du bloc. Elle est encore dans le coma, mais les chances sont de son côté pour s’en sortir. » Elle déclare dans une voix sérieuse. « Vous ne pouvez pas encore la voir, mais d’ici une heure, elle sera dans le service des soins intensifs. » Je suis incapable de lui répondre quoi que ce soit. Elle ne semble pas attendre quoi que ce soit de ma part et retourne sur ses pas. Cette nouvelle me soulage tellement que je viens te prendre dans mes bras. Je tremble, partagé par des émotions totalement contradictoires, mais surtout cette envie de pleurer qui me prend les tripes.

Je ne trouve plus aucune solution pour faire taire l'angoisse qui anime ton corps. Je te sens tendu, dépité, à bout de force. Je n'ai pas la capacité d'être celui qui te tend la main pour te relever et lutter contre la tempête qui s'abat contre toi. J'ignore comment te soutenir, ce que je suis censé faire quand ton état de fragilité prend part de toi. Alors je te suis gentiment quand tu m'annonces que tu dois fumer, avec ce goût d'amertume au fond de la gorge. J'ai de la difficulté à accepter mon inutilité, mais je me résigne à t'apporter mon soutien. J'essaye d'être présent, malgré tout. Alors qu'on s'apprêtait à revenir à l'extérieur, un médecin nous interpelle. Elle nous donne les renseignements concernant l'état de ta sœur, tous les éléments nécessaires pour connaître son évolution depuis que tu l'as amenée ici. Les choses sont en bonne voie, à ma plus grande satisfaction. Quand la professionnelle disparaît dans le couloir, je me tourne vers toi avec un grand sourire d'engouement. Pourtant tu te blottis au creux de mes bras, comme un besoin de te raccrocher à quelque chose. Je me contente de caresser ton dos puis ta nuque. « Tu es soulagé ? » Je t'interroge car je ne sais pas exactement comment comprendre ton besoin d'affection soudain.