La vie continue malgré tout [pv Jazz]

Depuis la mort de Samuel, je n'étais plus que l'ombre de moi-même. Je n'avais plus goût à rien et même si je montrais le contraire quand je me trouvais sur les plateaux de tournage, la réalité était toute autre. Quand je ne travaillais pas, je restais enfermée chez moi, devant ma télé ou alors dans mon lit, avec l'un des tee-shirt de mon mari, dans mes bras, serré contre moi. Je sais bien que Sam n'aimerait pas me voir dans cet état, mais le fait est, qu'aujourd'hui il n'était plus là. J'étais seule et bien que mes proches et mes amis soient là pour moi, je n'arrivais plus à retrouver cette joie de vivre qui me portait autrefois. Oui mais voilà, je ne pouvais pas continuer comme ça, il fallait que je me reprenne en main et c'est suite à une longue conversation que j'avais eu avec ma meilleure amie, que j'avais compris cela. Et c'est pourquoi, ce jour-là, plutôt que de restée à la maison, à ne rien faire, enfermée dans le souvenir de ma vie d'autrefois, j'avais pris la décision de sortir de chez moi pour me rendre au marché et faire le tour des étalages, histoire de prendre l'air et penser à autre chose qu'à ce jour où ma vie avait basculé. Ainsi après m'être préparée tranquillement, j'avais quitté mon domicile pour me rendre dans le quartier de Downtown et une fois arrivée à destination, j'avais commencé à défiler dans les allées du marché, quand tout à coup mon regard s'était posé sur un jeune couple, fous amoureux l'un de l'autre apparemment. De toutes les situations que j'aurai pu rencontrer en sortant de chez moi ce jour-là, celle-ci était bien la seule à laquelle je n'avais pas pensé, mais aussi la plus douloureuse. Pourquoi ? Parce que voir ce couple aussi heureux m'avait rappelé en un éclair tout ce que j'avais perdu, quelques mois auparavant. Soudain, je m'étais mise à manquer d'air. Je n'arrivais plus à respirer, alors même que je me trouvais à l'extérieur. Je ne saurai dire pourquoi, mais toujours est-il qu'à l'instant même où je manquais d'air, je me fichais complètement de savoir si des paparazzis étaient dans les parages ou non. Tout ce dont j'avais envie à ce moment-là, c'était retrouver mon souffle et rentrer chez moi. Comment se faisait-il, alors que le meurtrier de mon mari se trouvait en prison, que je me sente oppressée comme ça, dans les allées de ce marché, alors que celui-ci n'était même pas rempli de monde ? Allez savoir. Toujours est-il que plus les secondes passaient, plus j'avais l'impression que mon cœur se serrait dans ma poitrine et que les battements de celui-ci ralentissaient...

Qu'est-ce qui m'avait pris de sortir de chez moi ? Qu'est-ce qui m'avait pris d'imaginer que ma vie pouvait reprendre son cours, comme si de rien était ? Comment se faisait-il que je n'ai pas essayé de me préparer mentalement à l'idée de rencontrer des couples sur mon passage ? Tant de questions allaient et venaient dans ma tête. A tel point d'ailleurs, alors que j’étais clairement en train de faire un malaise, je venais de percuter quelque chose ou quelqu’un. Passant alors une main sur mon front, j’avais fermé les yeux quelques secondes, tout en essayant de reprendre mon souffle et d’avoir à nouveau une respiration normale. Puis une fois que ce fût fait, j’avais rouvert ceux-ci et après que le jeune homme que je venais de percuter se soit excusé, j’avais secoué doucement la tête de gauche à droite avant de prendre à mon tour la parole pour m’adresser à lui :

- Non, non, vous n'avez pas à vous excuser. C'est de ma faute si nous nous sommes rentrés dedans. Si j’avais regardé où j’allais, plutôt que de penser à autre chose, je vous aurai vu et on aurait pu éviter cette collision frontale.

Ce dernier me demandant ensuite si ça allait, j’avais simplement esquissé un léger sourire, avant de lui répondre :

- Oui, ne vous inquiétez pas. Au pire j’aurai une petite bosse sur le front mais ça partira.

Est-ce que ça allait ? Bien sûr que non. Mais si je n’étais pas au mieux de ma forme, ce n’était certainement pas de sa faute. Il n’avait rien à voir avec tout cela et je n’avais aucune envie de le mêler à cette histoire. C’est pourquoi je lui avais simplement dit que j’allais bien physiquement et que j’avais volontairement mit de côté mes souffrances intérieures. Après tout, je ne connaissais pas cet homme, alors pourquoi est-ce que je serai allé lui raconter que non je ne vais pas bien puisque que mon mari est décédé ? Cela n’aurait aucun sens. Mon regard balayant par la suite les alentours, j’avais repéré un petit bar, un peu à l’écart de ce marché et j’avais alors repris la parole à l’intention du jeune inconnu :

- Est-ce que je peux vous payer un verre pour me faire pardonner ? A moins que vous n’ayez déjà quelque chose de prévu, auquel cas, je ne vous retiendrai pas plus longtemps, je n'ai aucune envie de vous mettre en retard.