Le Tigre Brun entre en scène. (Jay & Sparkles)

Il était déjà assez tard. Quand elle tatoue, Sparkles ne se rend pas compte du temps qui passe. Aujourd'hui, elle était allée faire un tour chez son ami, le gérant de la boutique de tatouage dans le nord de la ville. Ils se connaissaient et s'entendaient très bien tous les deux. Il avait déjà essayé plusieurs fois de l'engager mais Sparkles avait toujours décliné son offre, ne souhaitant en aucune manière se mettre au service de quelqu'un. Mais cela ne l'empêchait pas de faire un tour dans le salon de temps en temps et de faire des tatouages si ça lui plaisait. Se retrouver entourée de gens qui partagent la même passion que vous, ça fait du bien parfois.

Elle venait donc de finir une journée semblable et s'apprêtait à rentrer chez elle. Mais avant, il fallait passer au Ambush pour récupérer un paquet qu'une amie devait lui remettre. Un pari qu'elle avait gagné et elle tenait absolument à récupérer son bien. Elle se gara devant, entra dans le bar, salua le barman et se dirigea directement à l'arrière, dans le petit carré qui servait de bureau à son amie. Être comptable dans un bar miteux ne donne pas droit à un bureau de luxe, malheureusement. Danila n'était pas là. Sparkles fouilla un peu l'intérieur mais ne voyant pas son paquet elle se mit à la recherche de son amie. Elle devrait sûrement être à l'arrière en train de se défoncer, comme d'habitude.

La jeune femme atterrit donc à l'arrière du bar mais aucune trace de qui elle cherche nulle part. Terriblement agacée par la situation, Sparkles s'apprêtait déjà à faire demi-tour quand elle vit une chose pas très nette à quelques pas de là. Il y avait trois hommes debout, deux très grands qui lui faisaient dos et un autre plus menu qui leur faisait face. Ils avaient tous des mallettes à la main et semblaient en grande conversation. Sparkles sourit, amusée, pensant directement qu'il devait s'agir d'une affaire chelou, surtout si ça se trouvait dans ce bar qui avait une sale réputation dans la ville. Nullement intéressée par la suite, elle aurait sûrement fait demi-tour et serait rentrée chez elle si le phare d'une voiture qui passait par là n'avait pas furtivement effleuré le visage de l'homme plus menu qui lui faisait face. Jaysukh Karant. Elle avait déjà vu sa tête d'Indien plusieurs fois maintenant pour pouvoir le reconnaître dans n'importe quelle obscurité.

Qu'est-ce qu'il faisait là avec ces deux types ? Et que renfermaient ses manette douteuses ? Elle savait que le jeune homme menait des activités pas très réglementaires mais le voir là l'étonnait tout de même. Soudain, la jeune femme eu envie de savoir ce qui se passait. Mieux encore, elle voulait participer. Il y avait longtemps qu'elle n'avait pas fait un truc extrêmement risqué, l'adrénaline et l'excitation que cela conférait lui manquaient. C'est donc tranquillement et sans aucune peur qu'elle se dirigea vers le trio jusqu'à s'arrêter pile poil à côté de l'indien. Elle rit presque à leurs regards surpris. Désolée patron, vraiment désolée du retard, j'ai été prise dans les embouteillages, dit-elle en s'adressant à Jay de la manière la plus naturelle au monde, simulant un air vraiment penaud. Puis elle se tourna vers les deux bolosses qui ne semblaient pas ravis de la voir. Oh excusez-moi, dit-elle en leur tendant la main. Je suis Laurie Kenner, sa secrétaire. Vous pouvez continuer tranquillement hein, faites comme si j'étais pas là, moi je vais juste... garder les mallettes et prendre des notes dans ma tête. En disant cela, elle prit la mallettes de la main de l'Indien pour illustrer ses propos. Elle jubilait en attendant leurs réactions à tous les trois.

Ok d'accord. Elle savait qu'il ne l'embrasserait pas en la voyant. Elle avait imaginé beaucoup de réactions mais pas celui-là. Pas ce rejet. Quoi, lui il pouvait débouler dans sa vie et chez elle comme il l'entend mais dès qu'elle se mêlait de ses affaires, monsieur prenait la mouche ? Sa réaction la blessa profondément, beaucoup plus qu'elle ne l'aurait voulu en fait. Elle pensa tout de suite à partir et à rayer cet homme de sa vie sur le champ mais ce que lui dit l'un des bolosses l'interpella. Il pensait sans doute qu'elle ne comprendrait pas la langue mais la jeune femme avait un père espion et la première chose en haut de la liste du programme qu'elle avait suivi c'était "être polyglotte". Le russe, elle maîtrisait parfaitement. Elle écouta Jay répondre à l'homme dans la même langue. Très intéressant tout ça. Manifestement, il avait peur de ces hommes, chose normal en même temps, on parlait de la mafia russe là. Quelles genres d'affaires il pouvait faire avec des gars aussi dangereux ?

Il se tourna vers elle pour la renvoyer d'un ton froid et hautain avant de l'ignorer totalement. Là tout de suite elle lui aurait bien refait le portrait comme la dernière fois chez elle mais elle décida de lui faire payer autrement son comportement. Elle lui rétorqua sur le même ton froid. Je crois que vous devriez quand même faire vite, boss. Il y a eu un meurtre dans le coin ce soir et les flics pullulent les rues. Faire nos affaires dans ces conditions... c'est pas vraiment sûr. Puis elle posa son regard sur les deux autres en face d'eux. Il vaut mieux toujours être prudent. Mais c'est votre métier, vous devez le savoir ça. Elle allait faire couler son affaire à cet Indien malpoli. Il l'avait blessé et elle allait se venger.

Un petit sourire se dessina sur ses lèvres. Elle était satisfaite de son coup. Sa fausse annonce avait eu le résultat escompté, le groupe était maintenant dispersé. Ils y avaient cru à son histoire de police. Peut-être que je devrais penser à être actrice finalement, songea la jeune fille amusée. Quand elle entendit Jay donner un autre point de rendez-vous à ses boloss, ses yeux se mirent à pétiller. Il n'avait absolument aucune de ce qu'elle lui réservait le pauvre. Il allait payer ce rejet qu'il manifestait à son égard. Personne ne l’utilisait pour la jeter à souhait.

Elle attrapa le col de la chemise de Jay, le forçant à revenir sur ses pas et se rapprocha de lui au point que leurs nez se frôlent presque.

- Traiter avec des gros morceaux comme la mafia Russe, ça excite hein ? On ne pense même plus au fait qu'ils peuvent nous briser la mâchoire en une seconde, tant l'adrénaline nous grise.

Sur ces mots, elle lui attrapa la mâchoire d'une main de fer et l'embrassa violemment. Il n'y avait rien de tendre dans son baiser, il était donné pour faire mal, littéralement. Elle lui mordit sauvagement la lèvre inférieure avant de le relâcher aussi brusquement qu'elle l'avait saisi.

- Comment c'était ? Vous avez apprécié le moment ?

Elle sentait une légère colère monter en elle. Jay avait le pouvoir de la mettre dans tous ses états en quelques minutes et cette fois-ci encore, il y arrivait bien.

- Regardez-moi bien. Le deal est simple. Ou vous me laisser participer à votre petite... escroquerie ou alors je deviens votre pire cauchemar. Et croyez moi, j'ai toutes les infos pour. Et je n'ai absolument aucune limite quand je m'y mets.

Elle ne bluffait pas, elle sait que son égo meurtri pourrait l'emmener à faire des choses horribles à cet homme, même si elle l'appréciait bien. C'était comme ça. Elle était comme ça. Et elle ne demandait pas la lune non plus. Tout ce qu'elle voulait, c'était participer à son opération.

- Alors ? Vous m'emmenez à cette fameuse adresse avec vous ? Je promets que je respecterai vos ordres à la lettre si vous me laisser participer.

Ça c'était un gros mensonge, elle ne comptait pas suivre ses ordres s'ils ne lui plaisent pas. Mais valait mieux pas qu'il le sache ça. En tout cas, elle était bien décidée: ou il l'emmenait ou aucun d'eux n'ira.