(FINI) CHARYN • Explosion

Ca te fais du bien de le dire un peu. De dire ce que tu penses de toi même. Une vaurienne. Une pauvre gosse sans importance que l'on peut manipuler à sa guise. Un pion sans valeur. C'est bien c'qu'ils ont fait de toi nan ? Char t'écoute. C'est bien la première fois que quelqu'un fait ça. T'écouter. En dehors de Spark. Tu te laisses un peu aller contre elle, tu profites un peu de son câlin puis tu t'éloignes. Tu penses pas l'mériter puis t'es pas très câline sauf peut-être au lit et encore. Tu peux pas lui promettre grand chose. Juste de la prévenir quand tu sors. Où, quand, avec qui, quoique ces points changent au cours de la nuit mais au moins tu peux lui donner signe de vie. Au moins ça. Tu l'feras. Tu fais rarement des promesses parce que quand tu promets quelque chose, t'essayes de t'y tenir. C'est a peu près la seule règle à laquelle tu tiennes vraiment. Quoique dise ou fasses les autres, à tes yeux, les promesses sont faites pour être tenues. Si tu fais une promesse en l'air, c'est que tu vaux rien.

T'écartant d'elle, tu te prépares pour sortir. Et là, de nouveau Char pique une crise. Tu comprends qu'elle s'inquiète mais ça t'exaspère. Bon dieu mais t'as plus seize ans ! - Relax Char' ! J'vais juste chez Spark ! J'ai un devoir en histoire de l'art à rendre et elle a promis de m'filer un coup de main vu qu'on suit les mêmes cours. Puis j'dormirais un peu chez elle ! Et je sors pas ce soir ! Ok ça c'est un gros mensonge. Un gros mensonge dans une vérité vraie. Tu vas effectivement chez Spark. Spark c'est ta fausse jumelle. Même caractère, même idées de la vie, vous vous ressemblez. Et parfois c'est même un peu incestueux entre vous deux pour des jumelles. C'est ta meilleure amie. Bref tu vas effectivement chez elle. Tu vas effectivement lui demander un coup de main pour ton devoir. Et peut-être que tu dormiras un peu chez elle. Ou pas. Ca dépend ce qu'elle aura prévu ou envie de faire. Et pour le reste ... T'as pas prévu de sortir à la base mais tu sais que si quelqu'un te proposes une bonne fête ou une bonne soirée t'accepteras. T'as besoin de ça pour oublier. C'est la seule chose qui canalise un peu cette colère qui te bouffe de l'intérieur. Mais j'veux bien manger un bout avec toi si ça te permets d'arrêter de me considérer comme une adolescente capricieuse ! Tu vas faire quoi après maman ? Me priver de sortie ? tu railles. C'était censé être une blague ça aussi. C'était peut-être pas l'bon moment. Puis tu peux pas m'empêcher de revenir. J'paye une partie du loyer moi aussi. tu lances en te dirigeant vers la cuisine pour ouvrir le frigo et regarder ce qu'il contient. 

« Je croyais t'avoir déjà répété mille et une fois de ne plus m'appeler Char. C'est Chad, CHAD avec un D ! Je suis pas un véhicule de guerre moi. »

Tu ne sais pas pourquoi mais ça t'a toujours énervée qu'on t’appelles par ce surnom ridicule qu'est "Char". Non mais sérieux quoi, ayez un peu d'imagination, les gens. En plus c'est même pas joli comme surnom. Mais Ryn elle... bah comme d'habitude quoi. Elle fait tout ce qu'on lui refuse.

Tiens, elle va chez la fameuse Spark, tu t'en serais doutée. Tu ne l'aimes pas cette fille. C'est vrai quoi, elle a une chevelure magnifique, on lui concède. Mais dans le genre bad girl délurée, il y a pas pire. La fille elle a à peine 21 ans et elle est tatoueuse. Ce qui veut dire qu'elle travaille avec des gens pas très nets tous les jours. Une moindre erreur et elle se fera agresser un de ces jours. Et si Ryn est amie avec... Elle a beau être talentueuse et aider ta sœur dans ses études, n'empêche qu'elle n'est pas ce que tu peux appeler une bonne fréquentation.

« Je ne suis pas sûre de vouloir que tu dormes chez cette fille, Ryn. Elle ne m'inspire pas.... sécurité. » tu commences doucement.

Tu sais que Staryn va encore te tomber dessus en criant qu'elle n'est pas une gamine mais ça ne peut pas t'empêcher de dire ce que tu ressens. Sa Spark là... tu n'aimeras jamais cette fille, point. Mais au moins, ta sœur dit qu'elle n'a pas prévue de sortir ce soir. Tu peines à croire ça mais tu n'as pas le choix. Tu dois apprendre à lui faire confiance. Mais alors que tu vas lui proposer de lui faire à manger, voilà qu'elle part encore dans tous les sens et te lance ce mot...

« Tu ne m'appelles pas maman, d'accord ? Je ne suis pas elle et je ne le serai jamais. Je n'ai pas d'enfants que j'ai mis au monde pour ensuite me suicider et les laisser souffrir le martyr. Je ne suis pas ta mère, je suis ta sœur et moi je ne t'abandonnerai jamais alors merci de ne pas nous confondre !»

Tu as explosé sans vraiment savoir pourquoi. On ne t'avait encore jamais appelé maman jusque là. Tu te rends alors compte que, si tu t'ai ainsi acharné à retrouver ta sœur et à la protéger, c'est qu'inconsciemment tu ne veux pas être comme votre mère. Tu te compares sans le vouloir à elle et essaies de faire les choses différemment. Tu essaies de faire mieux. Cette découverte ne te plait pas du tout. T'as pas envie de te comparer à une morte, surtout si cette morte est une mère que tu adorais autrefois. Tu rentres dans la cuisine encore sur le mauvais goût de cette prise de conscience et tu pousses légèrement ta soeur pour avoir le frigo pour toi.

« Bouge toi de là, je m'en charge. Et dis-toi que je peux très bien payer ce loyer toute seule. Je le faisais avant de te retrouver. » finis-tu en maugréant presque, tout en sortant œufs et compagnies du frigo.

Chad avec un d. Tu trouves ça pourri comme surnom. Donc tu vas te contenter du tient. Char', tu trouves ça cool toi. Et comme d'habitude, ta soeur va râler parce que tu fais l'inverse de ce que tu lui dis. T'es une emmerdeuse patentée, ta ça dans l'sang apparemment. Quand on te donne un autre, qu'on te mets une limite ou un interdit, qu'on te dit quoi faire, tu as l'envie irrépressible d'aller dans le sens contraire. Tu lèves les yeux au ciel en mettant tes bottes noires à talons et tu essayes plus ou moins de la rassurer. Spark. Ton double, ta meilleure amie, ta moitié. Ta soeur peut pas la piffrer. Du coup c'est encore meilleur de l'avoir à tes côtés. "Elle ne m'inspire pas sécurité". Si tu n'avais pas craint de voir ta soeur fait un infarctus t'aurais éclaté de rire. Evidemment, Spark est l'inverse de la sécurité. Elle représente l'adrénaline, le rire, la jeunesse, le danger. Elle représente la luxure, la fête, les déconnades, la vie elle même. Avec Spark, tu te sens plus apaisée, moins en colère. Pourtant, étonnamment tu te sens en sécurité avec elle. Elle te voit. Elle te comprend. Elle est là pour toi. - Ecoute Char', Spark est ma meilleure amie alors ou tu t'y fais, ou tu continue à râler dans le vide, tu réponds simplement en fermant la fermeture éclair de ta seconde botte.

- Ah ! Tu vois que tu lui en veux toi aussi ! tu rétorques une fois qu'elle a fini sa tirade sur votre mère et la lâcheté dont elle a fait preuve en vous abandonnant sur fond d'amertume, de rancoeur et de colère. Et dire que quelques minutes auparavant, elle en faisait l'éloge comme quoi elle était une bonne maman, qu'avec elle tu n'aurais pas fini aussi dévergondée et blablabla. Comme quoi ta soeur n'est pas non plus un modèle de patience et de pardon illimité. Tu vas ouvrir le frigo. Maintenant que tu t'es bien défoulé sur ta soeur, que t'es bien réveillé, ben ta faim. Ouais l'alcool ça file le creux. T'as pas le temps de choisir ce que tu veux que ta soeur te vire. - Héé ! tu lances mais tu lui en veux pas; tu sais pas faire à bouffer. Tu lèves les yeux au ciel alors qu'elle maugréé. Ouais et dans ces cas là tu pourrais effectivement mettre tes menaces à exécution. Ca va merci ! J'suis pas une gosse qu'on entretient et qu'on peut foutre à la porte du jour au lendemain sous prétexte qu'elle devient gênante ! tu rétorques de manière acide, insinuant qu'elle serait capable de le faire. De te virer. De t'abandonner à nouveau. Alors qu'elle venait justement de dire le contraire.

Ca s'arrangeait pourtant entre vous deux. Mais chaque fois que l'une dit un truc à l'autre, ça repart de plus belle. A croire que vous êtes pas faites pour vous entendre. - J'ai pas faim finalement ... Si tu veux changer les serrures en mon absence, préviens moi au moins par sms que j'reste dormir ailleurs ... tu te diriges vers ta chambre pour attraper manteau, écharpe, sac et casque. Ouais tu comptes prendre ta moto. A la base, tu voulais pas mais elle t'a énervé et t'as besoin de ça pour décompresser.  

Et voilà, toujours à se rebeller et à défendre ce qu'elle pense. Spark est ma meilleure amie, nanani nananère. De toutes les façons, tu savais où elle habitait, cette fameuse Spark. Alors si jamais quelque chose se passe mal, elle peut être sûre qu'elle aura à faire à toi.

« Je lui en veux peut-être mais je l'aime plus que je ne suis en colère contre elle. Elle avait peut-être ses raisons. Ce n'est pas comme papa qui lui a choisi de détruire notre famille. »

Lui... lui il n'aura jamais ton pardon. Pour ce qu'il t'a fait à toi, à votre mère, à tes frères... à votre nom. Jamais tu ne lui pardonneras.

Tu réfléchissais tranquillement à quoi fourrer dans le ventre de la petite rebelle quand boum! Elle explose à nouveau. Elle dégaine, dégaine et évidemment laisse tout tomber pour repartir dans sa chambre. Tu soupires, masses tes tempes avec tes mains. Tu es fatiguée, épuisée, aussi bien mentalement que physiquement. La nuit blanche que tu viens de passer n'est pas le meilleur préliminaire pour une matinée aussi orageuse. Tu commences doucement à perdre pied. Tu as envie de te barrer, loin, dans un désert ou même au fond d'un océan. N'importe où sauf ici.

Tu l'aperçois traverser le salon et se diriger vers la porte à grand pas. Résignée, tu serais presque prête à la laisser partir si tu n'avais pas aperçu ce casque dans ses mains. Oh non, ça c'était hors de question ! Tu attrapes la corbeille d’œufs, en prend un et le lance de toute la force dont tu disposes encore. Il la rate de peu et va s'écraser contre la porte en question. Dommage, tu penses. Tu te diriges comme une furie sur elle en ignorant complètement ce qu'elle vocifère, lui arrache le casque des mains, la lui plonge sur la tête et la traîne pour la faire asseoir dans le canapé le plus proche.

« Tu veux faire de la moto ? Génial. Mais ce sera sur ce canapé. Bouge de là ne serait-ce que d'un iota et je te donne un bain d’œuf sanglant.» finis-tu en brandissant ton corbeille d’œufs tel un trophée.

Cette fois, tu étais prête à tout mais elle ne montera pas sur cet engin dans son état.

- Pas elle peut-être ?! tu railles. Nan parce que bon, en général quand on est mère de famille on essaye au moins de faire en sorte que ses gamins ne manque de rien dans la vie ! T'es en colère. Et toi même tu ne comprends pas pourquoi tu l'es plus envers votre mère que votre père. T'es la seule qui lui parle encore à ce dernier. La seule a aller le voir depuis que tu sais qui tu es. Il a été surpris de te voir débarquer un jour à la prison. Surpris de tout. Tu lui as expliqué. Parlé de toi. De Char. Du fait que tu ignorais ce que Lay était devenu. Que Rosée était décédée. Que vous étiez tous brisés, désunis, que la vie vous avez séparés. Que Char était trop en colère contre lui pour venir le voir. Tu vas le voir une fois par semaine, le vendredi après-midi parce que tu n'as pas cours. Tu ne le dis pas à Char. Elle ne te le pardonnerait pas ça.

Bon ça y'est t'en a marre. Tu te casses. Tu vas aller te réfugier chez Spark. Dans ses bras. Dans ses draps. N'importe où loin d'ici. Tu pourrais aller voir Cielo ou Rayhane pour oublier aussi mais là tu sens que t'as besoin de ta meilleure amie. Juste d'elle. Alors tu prends tes affaires et puis ton casque aussi. La moto va t'aider à décompresser. Mais alors que tu te diriges vers la porte d'entrée, tu sens un truc te frôler et s'écraser contre elle. Un oeuf. Sur le coup tu restes trop conne à le regarder dégouliner d'une manière dégueulasse sur le bois. Puis soudain tu sens qu'on t'empoigne. Tu cries et tu te débats. Char te balance sur le canapé en te hurlant dessus. - Mais t'es malade ! tu hurles à ton tour. Tu te lèves pour éviter un oeuf. Mais t'es complètement cinglée ma pauvre ! Tu cours vers la cuisine en t'abritant derrière la porte du frigo quand elle te lance un oeuf. Mais arrête ! Tu attrapes le premier truc qui te passe sous la main. Un reste de pâtes bolo. Dégueu. Tu le balances sur ta soeur. Tu prends un oeuf dans les cheveux. Tes beaux cheveux si soyeux. Tu lui balances de la crème qu'elle prend dans la figure. Elle encore un oeuf. Toi t'attrapes la farine. Ca devient une véritable bataille. Ca aurait pu être drôle si tout n'était pas lancé avec tant de rage et de fureur. ARRETE BORDEL !! Tu finis par hurler. Tu t'approches d'elle et tu la repousses. Je te déteste. Tu la fixes, ombrageuse. Je vais aller prendre une douche. Et je vais me barrer Chardonnay. Et rien de ce que tu pourras faire ne m'en empêchera. Tiens. Tu prends sa main et tu y fourres tes clés de moto. T'as gagné. J'irais en taxi. Ouais. Trop forte. Et tu pars en claquant la porte de la salle de bain. Tu reprends une douche plus ou moins rapide vu que tu as du putain d'oeuf dans les cheveux et après t'êtres habillée tu prends un sac avec quelques affaires et tu te casses en claquant violemment la porte d'entrée sans adresser un seul regard à ta soeur aînée, le coeur en miette et les larmes ravageant ton visage. Pourquoi faut-il que tout soit aussi compliqué ?!