Holy cr*p... ! ~ Lyhley ~

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Lyhla couvrit sa bouche de ses mains, dans l'espoir d'étouffer sa quinte de toux. Comme à son habitude, elle se levait tôt, par manque de sommeil. Non loin de là, Ainsley dormait encore, et elle ne souhaitait pas la réveiller. Depuis qu'elles étaient plus ou moins de nouveau des femmes mariées, et dormaient ensemble, leurs nuits étaient courtes. Principalement parce que Lyhla était souvent saisie de toux lui arrachant la gorge quand elle était en position couchée. Il lui était alors difficile de s'endormir, et à Ainsley aussi. Néanmoins, des deux, Ainsley était la seule à encore travailler, et Lyhla s'en voulait terriblement de ne pas la laisser se reposer.

Fort heureusement, aujourd'hui était un samedi. Elle espérait qu'Ainsley en profiterait pour dormir plus longuement. Lyhla referma silencieusement la porte de la salle de bains derrière elle, et descendit les escaliers pour rejoindre la cuisine. Faisant le moins de bruit possible, elle se mit à préparer une salade de fruits, n'ayant pas grand-chose d'autre à faire et souhaitant se rendre utile. En plus, s'occuper les mains, se concentrer l'aidait à oublier sa condition, sa future opération, tous ces soucis. Elle pouvait se vider l'esprit, comme on dit. Et se rendre utile.

La femme mettait un film sur le saladier contenant les morceaux de fruits, lorsque la sonnette retentit dans la maison. Elle grimaça, rouspétant déjà, parce qu'elle savait parfaitement qu'Ainsley allait être réveillée par ce bruit strident. Elle en profita pour maudire l'artisan qui avait installé cette foutue sonnette, et pour jeter un sort à l'inventeur de la sonnette, et à tous les abrutis qui en vendaient, le tout sans fournir de bouton de réglage de volume sonore. Elle rêvassait diaboliquement d'une telle idée lorsqu'un deuxième sifflet retentit. Cette fois-ci, elle en lâcha un juron à mi-voix.

Lyhla jeta le torchon qu'elle venait d'utiliser pour s'essuyer les mains sur le plan de travail, et se dirigea à grands pas vers la porte, plus pour prévenir une autre sonnerie qu'autre chose. Elle déverrouilla le battant, puis l'ouvrit. Et se rendit compte de l'impression qu'elle donnait. Il était sept heures du matin, elle était déjà en T-shirt échancré et en jean, le teint cireux, grisâtre, les cernes sombres et les yeux rougeâtres. Merde, qu'est-ce qu'elle va penser... ?

« Madame Pryce Number One ? »

Le surnom qu'elle lui donnait, pour la différencier d'Ainsley et d'elle-même... quand elles étaient encore ensemble. En gros, le synonyme de « mère d'Ainsley ». Ou de « belle-mère ». Et, actuellement, et ce même si elle l'adorait, synonyme de « Ainsley au secours » et de « On est dans la merde ».

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Je me réveillais en trombe du lit, saisissant mon biper par réflexe. RAS. Je ne réalisais pas immédiatement que l'on avait sonné à la porte, tant il me fallut de temps pour réaliser que nous étions samedi. Je ne travaillais effectivement pas ce jour, bien que je demeurais de garde, pieds et poings liés à mes responsabilités de médecin légiste. Chaque jour était plus difficile que l'autre tant l'état de Lyhla se dégradait au fil des jours ; l'angoisse de la perdre me hantait. Lorsque que je ne travaillais pas de nuit et que je m'autorisais quelques heures de répit, mon sommeil était entrecoupé de réveils en sursauts ; Lyhla, respires-tu encore ? Je contrôlais sa respiration et son pouls - lorsque je ne la réveillais pas, et me rendormais aussitôt... jusqu'au prochain réveil. De fait, mes nuits étaient plutôt agitées, en plus d'être courtes et de piètre qualité.

Il me semblait que nous avions pris nos marques dans cette réalité quelque peu déconnectée et absurde, rythmée par les rendez-vous médicaux. Je m'étais rapidement installée dans notre ancienne chambre conjugale, oubliant mes principes au prétexte qu'il me fallait être au plus près d'elle pour m'assurer de son état de santé - et quelque part, m'endormir à ses côtés apaisait mes maux. Au-delà de cette « routine », un évènement notable s'était produit la semaine dernière - je m'étais laissée aller à ses côtés en amorçant un pas dans sa direction, enlaçant Lyhla comme « au bon vieux temps », jusqu'à ce que nous sombrions toutes deux dans le sommeil le plus profond. Depuis, à l'exception de quelques regards énamourés certainement à mon initiative et contre ma volonté, rien ne s'était produit et il me semblait que nous prenions un soin extrême à ne pas évoquer ce fait.

« Lyhla ? Tout va bien ? Qui est là ? » Dis-je en apercevant l'ombre d'un taxi repartir de la maison. « J'arrive ! » Je m'habillais à la hâte, enfilant en dernier lieu un cardigan en cachemire pour me réchauffer. Et, parce que je n'aimais pas paraître débraillée, je pris le temps de démêler mes longs cheveux roux avant de descendre les escaliers. « Lyhla... tu as l'air épuisée ! » Traduction : tu as l'air malade au plus haut point. J'aurais reconnu cet accent entre mille. « Maman ? » Dis-je tout de même, bien qu'il ne s'agissait pas d'une question. Cette dernière avait déjà posé une valise dans l'entrée et retirait son long manteau comme si de rien n'était, comme si nous l'avions attendu, tout naturellement. « Bonjour Ainsley. » Me dit-elle avec un large sourire, pointant néanmoins ses gants dans ma direction, l'air réprobateur. « Ainsley, nous prendrons le temps de discuter ce soir. » Je hochais la tête en soupirant, j'avais des ennuis. « Ranges ma valise, veux-tu ? » Ajouta t-elle simplement, se débarrassant de son manteau en me chargeant comme un mulet. « Lyhla... ça me fait tellement plaisir de te revoir... j'ai bien fait de ramener Ainsley à la raison... j'ai tellement de choses à te dire ! Tu as reçu ma carte pour Thanksgiving ? Bon elle n'était pas aussi amusante que l'année dernière... » Pardon ? « Quelle carte ? » Demandais-je aussitôt, manquant de trébucher sur la ceinture du manteau qui pendait mollement contre le parquet. « Parce que vous vous écrivez ? » Hoquetais-je en essayant d'attirer l'attention de Lyhla, écarquillant les yeux. « Depuis combien de temps ? » « Ainsley, mon manteau ! D'ailleurs, j'ai ramené des scones pour Lyhla, dans la pochette rouge. »

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Étourdie sous le flot de paroles sortant des cordes vocales de la mère d'Ainsley, et ce bien qu'elle aurait du y être habituée, Lyhla resta inerte, se faisant conduire vers sa propre cuisine. Hébétée, il lui fallut un peu de temps avant de sortir de son état paralysant, pour passer une main nerveuse et agitée dans ses cheveux, et offrir un sourire pâle à sa future/ex/future-ex/ex-future belle-mère. « Je vous offre de la salade de fruits ? Je viens de la faire, attendez je vous sors un bol. » Technique pour parer au flot de paroles : répondre par son propre flot de paroles. Continuant de déblatérer sur les fruits et la saison, Lyhla sortit sa salade tout juste préparée du réfrigérateur et en servit un ramequin débordant à la mère d'Ainsley. Au passage, elle jeta un bref regard à sa... compagne, se décida-t-elle, tentant de lui faire passer par un simple regard les messages « Je t'expliquerai tout », « Pitié ne m'en veux pas » et « Au secours ! »

« Vous voulez un thé je suppose ? Ainsley, tu peux m'aider à attraper les thés s'il te plaît ? » Lyhla se dirigea vers le placard contenant les thés, situé en hauteur. Ce faisant, elle tournait le dos à la mère d'Ainsley, qui continuait de babiller, et Lyhla se risqua à montrer sa faiblesse. Elle ferma les yeux et s'appuya au plan de travail, tentant de réguler sa respiration. Elle sentait son cœur battre à tout rompre, de peur, de détresse. De peur de ne rien pouvoir cacher à sa belle-mère, peur de sa réaction, de peur de perdre à nouveau Ainsley, peur de la décevoir. Elle se trouvait face à une situation inédite, emplie de tension, et, pour l'une des rares fois dans sa vie, elle ne sut pas comment réagir, et elle se perdit, emportée dans un tourbillon de détresse pure. Autant, savoir que faire avec un flingue pointé sur elle, elle savait faire. Autant, face à la mère de sa compagne, face à sa compagne-même, face à elle-même, elle ne savait que faire...

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Je m'exécutais en montant l'escalier à la hâte pour déposer l'énorme valise dans la chambre d'amis. Je déposais également son manteau dans le placard, cherchant vainement tout ce qui pouvait me retarder : une écharpée tombée par terre, des chaussures rangées en vrac, des saletés diverses sur le sol... Je dus me faire une raison et revins sur mes pas en traînant des pieds - ce qui ne me ressemblait guère, tandis que Lyhla attrapait mon regard. Sourcils froncés, je mimais du bout des lèvres « oui tu vas tout m'expliquer darling ! ».

« Vous voulez un thé je suppose ? Ainsley, tu peux m'aider à attraper les thés s'il te plaît ? » Je mis quelques instants avant de réaliser que Lyhla s'agrippait au plan de travail, tournant le dos à ma mère. Aussi, je m'avançais de quelques pas dans sa direction, enlaçant sa taille fragile - ce qui était en réalité pour la soutenir, attrapant quelques boîtes à thé. « Tiens, Maman, je te laisse choisir. » Dis-je, sachant pertinemment que cette dernière se lancerait dans un monologue interminable. Je déposais une théière sur le feu et fis mine de déposer un baiser dans le cou de Lyhla alors que je faisais glisser une boîte de médicaments contre sa poitrine. « Tu veux aller te reposer ? » Murmurais-je à son oreille tandis que l'odeur de son shampoing vint une fois de plus m'attirer contre elle.

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Lyhla frémit, de bonheur, de soulagement, lorsque le bras d'Ainsley encercla sa taille, présence rassurante et solide. Elle laissa sa compagne faire, prenant son temps pour reprendre son souffle et son calme, nauséeuse, entendant son cœur battre à l'intérieur de son crâne. Lorsque les lèvres d'Ainsley effleurèrent son cou, et qu'elle la serra contre elle, elle se sentit rechuter. Comme si elle ne pouvait plus se passer d'elle, comme si elle n'était pas capable de vivre sans elle, comme si elle s'accrochait si désespérément à elle que n'importe lequel de ses mouvements la rendait dingue. En fait, c'était exactement ce qui se passait. Sans Ainsley, elle se serait probablement déjà tiré une balle dans la tête.

Lyhla prit doucement la boîte de médicaments, sur une inspiration tremblante, ses doigts se glissant par-dessus ceux d'Ainsley pour les serrer brièvement. « Tu veux aller te reposer ? » Un nouveau frisson parcourut la policière, qui rouvrit enfin les yeux. Lyhla posa son front contre la joue d'Ainsley, souriant doucement : « Et te laisser seule face à ta mère ? Tu m'en voudrais à mort. » Profitant de la sécurité que lui offrait le corps de sa compagne, Lyhla avala rapidement ses médicaments, repoussa la boîte dans un coin et se retourna, passant ses bras autour du cou d'Ainsley. Elle savoura cette proximité dont chaque jour l'impossibilité la brisait, déposa un baiser sur la joue d'Ainsley et lui chuchota à l'oreille : « Merci. » Puis, elle sortit à contrecœur de ses bras et rejoignit Miss Pryce Number One, affectant que rien ne s'était jamais passé, que tout allait très bien. Elle en eut d'autant plus envie de vomir.

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Je pris un soin extrême, de l'ordre de l'inimaginable, à faire abstraction de tout pour survivre ; la santé de Lyhla que je m'efforçais de prendre au jour le jour afin de ne pas sombrer, la surcharge de travail à la criminelle, particulièrement en période de fêtes, cherchez l'erreur, et le monceau de regrets qui s'accumulait jusqu'à me donner la nausée. Dire que nous aurions pu éviter cela... dire que nous aurions pu vivre... ensemble toutes ces années... et pourtant, son regard me détruisait tant il me rappelait celui de Ian... « Et te laisser seule face à ta mère ? Tu m'en voudrais à mort. » « Je me débrouillerais. » Chuchotais-je, déposant délicatement une main sur la sienne pour prendre son pouls en toute discrétion. « Merci. » Je t'aime. Je fermais les yeux lorsqu'elle déposait un baiser sur ma joue. Nous détachâmes notre étreinte pour rejoindre ma mère qui n'avait cessé de nous bercer avec son monologue pour lequel je n'avais pas prêté la moindre attention.

« ... et donc celui-ci me paraît tout à fait correct. Aurais-tu un peu de lait sweetheart ? » Hochant la tête, je me sentis traîner des pieds vers le réfrigérateur tandis que ma mère avait attiré l'attention de Lyhla. « Je n'ai pas compris immédiatement lorsqu'Ainsley m'a annoncé qu'elle ne viendrait pas pour les fêtes... maintenant je comprends... tu sais, quand elle m'a dit qu'elle réaménageait dans la maison, je me suis dit qu'elle était enfin revenue à la raison, ce n'est pas faute de... » « Voilà ! » Dis-je en déposant la théière avec plus de brutalité qu'il n'en faut - tout en me surprenant toutefois, déposant quelques cuillères de thé pour le faire infuser. Je rapprochais également le lait de ma mère et pris place dans le salon.

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Lyhla sursauta légèrement, surprise par la véhémence d'Ainsley. Instinctivement, elle fit doucement glisser ses doigts sur la main de la belle rousse, gardant néanmoins les yeux fixés sur la mère d'Ainsley, un léger sourire aux lèvres. « Revenue à la raison ? » l'interrogea-t-elle doucement, plus pour embêter Ainsley que pour avoir une véritable réponse. Elle eut le plaisir, du coin de l’œil, de voir ses joues se colorer de rouge, et elle lui décocha un clin d’œil taquin. Elle se sentait... bien. Cela ne lui était pas arrivé depuis longtemps. Elle appréciait ce moment, bien qu'une petite pointe insidieuse de gêne s'immisçait en elle. Ainsley était bizarre. Bien plus... émotive que d'habitude. Plus réticente, plus virulente. « C'est toi qui devrais aller te reposer. » murmura Lyhla, bougeant à peine les lèvres, en continuant de regarder sa belle-mère et de lui sourire.

« Je vais vous resservir en salade de fruits, attendez un instant. » décréta-t-elle en se levant, emportant le ramequin. Parvenue au plan de travail, elle l'y posa et le remplit de nouveau. Au moment où elle reposait la cuillère dans le saladier, un vertige la fit tanguer. Lyhla s'arrêta aussitôt, posa ses mains à plat sur le plan de travail, et tenta d'inspirer et d'expirer calmement pour se calmer. Sous ses yeux, le marbre noir de la cuisine roula de bâbord à tribord, devint flou, se transforma en une mer informe.

« Ains- » appela-t-elle, sans finir sa phrase. Une flèche glacée lui transperça le cœur, la fit se raidir un instant, puis s'écrouler au sol, emportant avec elle le ramequin qui vint s'écraser au sol, le tachant du rouge des framboises et du rouge de son sang.

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« Revenue à la raison ? » Je me raclais bruyamment la gorge en versant le thé fumant dans les tasses, sous l’œil amusé de Lyhla. « C'est toi qui devrais aller te reposer. » « En effet. » Marmottais-je en guise de réponse. Lyhla ignorait la partie sombre d'Ainsley ; elle était bercée par ce quotidien ô combien irréel sans se soucier, sans savoir, ignorant à quel point je pouvais m'effondrer en arrivant au travail. Elle ignorait tout de mes après-midi chez le psychiatre, tout de ma propre médication, de ce qui m'empêchait de sombrer, de mes crises d'angoisse qui s'accentuaient à mesure que le sommeil me manquait, à mesure que Lyhla s'éteignait sous mes yeux...

Et puis, je me sentis comme projetée à l'extérieur de mon corps, telle une spectatrice impassible devant la plus mauvaise pièce de théâtre à laquelle il m'eut été donné d'assister ; ma pauvre mère qui hurlait à s'en déchirer les tympans, imaginant le pire à la vue du sang, Lyhla étendue sur le sol au milieu des débris de verre... et moi...
Je repris connaissance après quelques instants et me ruais aussitôt vers Lyhla, réalisant que je m'étais agenouillée au milieu des éclats de verre, les genoux en sang. « Reste avec moi ! Tu. Ne. Vas. Pas. Mourir. » Dis-je en même temps que je réalisais un massage cardiaque, avec une si grande conviction que je lui brisais probablement les côtes mais qu'importe, j'aurais échangé ma vie pour la sienne. J'aurais donné tout ce que j'avais pour qu'elle se réveille... en vain. Il fallut m'arracher de force à Lyhla pour que les ambulanciers prennent le relais sous mes hurlements hystériques, les yeux couverts de ce voile humide si inhabituel chez moi que je crus un instant partir à mon tour...

» Call, cry, kiss ~ Lyhley
» Will you, one day, give me another chance ? ~ Lyhley
» Hell ? No way. ~ Lyhley ~
» I'll fly back to you, as fast as I can ~ Lyhley
» you'd say don't you cry, it's all gonna be alright - lyhley