le plaisir de se retourner la tête (stanislas - 7)

Ma fébrilité éclate avec force. Ton aveu me chamboule avec tant de force que je ne sais pas comment y réagir. Cette réalité résonne avec tant de violence en moi, rend le rythme de ma respiration plus forte et difficile. Cela me touche au plus profond de mes tripes, mais cette vérité m’est aussi douce qu’insupportable à la fois. Tout simplement, parce que je me sens incapable d’accepter ça, de pouvoir le vivre réellement sans ressentir cette hargne me prendre les tripes, une fois que la réalité m’éclatera de nouveau en plein visage. Cela me chamboule profondément, car je suis pris au piège par ces émotions si diamétralement opposées, qui s’affrontent sans relâche au plus profond de mon âme. Cela me rend fou. Je me sens incapable d’accepter cette putain d’évidence, que mon corps aime se soumettre au tien, qu’il meurt d’envie de retrouver ces sensations que seules ses étreintes lui procurent. Je me sens tellement confus, tellement empreint de ce dilemme qui fait rage en moi. Mes poings cognent le mur pour tenter d’amoindrir tout ce qui me tourmente avec tant d’effets destructeurs pour moi. J’ai envie de fuir. Cela me lacère les tripes. Je ne veux pas y penser, mais je ne peux rien promettre. Ma fierté et mon côté sauvage vont continuer à faire des ravages sur toi. Tu sais bien que tu es le seul à pouvoir me dompter, mais je demeure un être empli d’une fierté profonde, qui te blesse plus souvent que je ne dois l’imaginer. J’aimerai t’épargner ces mots assassins, mais c’est plus fort que moi. J’ai besoin de te rendre responsable pour ne pas sombrer dans la démence. Ton emprise sur mes poings ne calme pas mes tremblements. Tes paroles sont douces, mais les réalités renvoyées tarassent mon être. « Je ne peux pas. Je ne peux pas l’être. C’est contre nature, c’est contre les valeurs qu’on m’a donné. Mon père se retournerait dans sa tombe. Je jetterai le déshonneur sur ma famille. » Ma voix est faible, laisse exprimer de façon abrupte toutes ces angoisses qui m’empêchent de m’ouvrir à cette possibilité. « Déjà que je suis un moins que rien. C’est de ma faute si elle est dans cet état. Si en plus de ça, je suis comme ça... » Je ne termine pas ma phrase, incapable d’y parvenir. Cette boule de nerfs m’étrangle. Je suis incapable d’accepter ce que je pourrais potentiellement devenir avec toi. Cela me tuerait définitivement dans mon intégrité en tant qu’homme, de mâle, ce que je m’efforce d’être.

Je me cramponne à ta taille pour ne pas te laisser t'échapper, avant d'attraper tes mains dans les miennes pour t'empêcher de cogner tes poings contre le mur. Je ne veux pas que tu te blesses inutilement, juste pour cracher ta hargne. Je préfère trouver une solution pour calmer tes nerfs, apaiser la souffrance qui se rattache à ton cœur. Tu es tourmenté, torturé ; tu as de la difficulté à supporter le poids de la vérité et je le comprends. J'essaye de te rassurer comme je peux. « Dis pas n'importe quoi. Tu es quelqu'un de merveilleux Lip. Tu es pas une honte, ni une merde. » Je corrige tes propos en revenant enserrer ton bassin. Je me permets même de glisser une main sous ton t-shirt pour caresser ton ventre, tes abdominaux. Le contact n'est pas sensuel, plutôt plein de tendresse et accentué par des baisers contre ta nuque. Tout est douceur. « Cesse de voir ça comme une tare. C'est seulement du désir, et ton père aurait fini par le comprendre. Mais tu peux te laisser aller avec moi, je ne dirai rien. » Je souffle contre ta peau sans jamais te lâcher un seul instant. Je t'apaise avec amour. « Je suis une honte à tes yeux ? » Je te demande tout doucement, pour te faire comprendre que ta vision de moi n'est pas pour autant brouillée ou altérée, malgré l'amour que je ressens pour toi.

Tu essayes de me rassurant en usant de paroles bienveillantes et emplies de douceur, mais j’ai du mal à y croire. Je suis loin d’être cet être merveilleux que tu tentes de dépeindre, alors qu’il y a encore quelques minutes, tu exposais les blessures que ma fierté t’infligeait avec force. Comment croire en de telles paroles, quand bien même tes actions me semblent sincères ? J’ai conscience des cicatrices que laissent mes paroles acerbes lorsque les effets de la drogue se dissipe. Même si je suis disposé à vouloir me laisser couler avec toi, il y aura toujours ce malaise profond qui va me retourner les tripes et me faire machine arrière, car j’ai ce besoin indispensable de fuir cette putain de vie. Tu t’efforces à prodiguer toute ta douceur et ça me bouleverse totalement. Je me sens plus faible que jamais, les larmes au coin des yeux et cette boule de rage, qui sommeille au creux de mes reins. Me laisser aller avec toi, c’est ce que je fais déjà, mais c’est plus fort que moi. Je ne le contrôle pas ce putain de rejet. Il s’impose à moi sous l’impulsion de l’angoisse qui me retourne les tripes. Et ta question me trouble avec violence. « Non, jamais. Pas même quand je dis le contraire. » J’admets dans une faible voix en fermant les yeux. Je voudrai que tu le percute pour que mes paroles acerbes ne te blessent plus, car cela me rend encore plus misérable. Tu es ce que j’ai de plus cher. Tu sais bien que tu m’es indispensable. Tu pourrais être un meurtrier que je t’aiderai à enterrer tes corps sans ciller.

Je te sens tout bouleversé et mon coeur se serre. Je ne peux jamais rester impassible devant ton état de fébrilité, et je te soutiens comme je peux. Je te lance des paroles rassurantes, caresse ton corps avec douceur. Tu ne réponds pas et m'avoues simplement que je n'ai jamais été une honte à tes yeux. Je le savais déjà mais ça m'apaise de le savoir, car parfois tes paroles franches sont trop acerbes pour que je les supporte. « Alors tu ne l'es pas non plus Lip. » Parce qu'on est traversés par le même sentiment, et il est loin d'être malsain. Il a tout ce qu'il y a de plus normal et tu es en mesure de l'accepter, si seulement tu bravais toute ton idéologie. L'homosexualité n'est plus une tare à notre époque, et tu peux laisser couler les regards malveillants à ton égard. Tant qu'on unie nos forces, tout ira bien, alors repose-toi sur moi si tu le veux, et tout coulera de source. « Viens. » Je t'invite à me suivre en attrapant ta main, dans l'idée de rejoindre le lit pour me blottir dans tes bras musclés. Si seulement l'envie te taraude aussi. Je veux te retrouver et te procurer la douceur que tu sembles réclamer par un besoin compulsif d'être apaisé.

J’aimerai te croire lorsque tu déclares de telle chose, mais je ne suis pas aussi clément avec ma personne. Je sais que je suis loin d’être une bonne personne. Avec toi, peut-être, parce que la crainte de te perdre finit toujours par surpasser ma fierté, qui se révèle parfois dangereuse et me rend cruellement détestable. Je peux devenir un véritable monstre lorsque je suis tendu et je me sens agressé. Tu le sais tout autant que moi. Quitte à ce que je devienne violent. Je ne dis mot, car il est évident que ce n’est pas aujourd’hui, ni demain que je serai capable d’expliquer cette faiblesse pour le corps des hommes, qui sommeille en moi. Tu me demandes de te suivre et je n’omets pas de résistance à cet instant, car j’ai besoin d’être avec toi. Alors, je me laisse tomber sur le matelas de la pièce, te laisse prendre place à mes côtés et te serrer contre moi. Je t’offre la chaleur de mon corps et me serre contre toi. Ma respiration est forte, difficile, chamboulée par toutes ces émotions si contraires. « Je ne sais pas si je pourrais l’accepter, Stanley. Je risque de te faire du mal de nouveau, désolée… » Ma voix n’est que murmure, troublée par le mal-être que cela m’inflige au plus profond de moi et qui se révèle. Je suis loin d’être fier d’être l’enculé qui te blesse.

Tu te laisses légèrement apaiser sous le contact de mes doigts, car tu me suis calmement jusqu'au lit. Si tu étais encore trop sur les nerfs, tu te serais sans doute déchargé de mon emprise pour t'enfuir au loin. Alors je profite de cette proximité pour venir t'étreindre et placer ma tête dans ton cou. Ma jambe se glisse au-dessus de la tienne pour qu'on s'enlace avec douceur. Je caresse ton ventre sous ton-shirt, je savoure ton odeur et ta douceur. « Je t'en crois capable. Il faut juste que tu me fasses confiance, que tu te libères avec moi. Je sais que tu le peux. Les autres ne sont pas forcés de savoir. » Je commente doucement pour tenter de te rassurer et te diriger dans la voie de l'aveu. Je voudrais tellement que tu puisses te dépêtrer de ce poids lourd qui encombre ton coeur, au moins avec moi. « On peut s'aimer en silence. » Je reprends en venant te regarder dans les yeux. Je remarque mon erreur dans les propos que j'énonce et je me rattrape rapidement, les joues rouges, l'air de rien. Je veux que tu remarques que ce n'est qu'une erreur, ça ne signifie rien. « Enfin se désirer. » Je replace ma tête dans ton cou.

Tu es empli d'un optimisme qui me trouble toujours avec autant de force que par le passé. C'est sans doute ce qui m'a toujours attiré vers toi. Tu as cette aisance de vouloir croire en les gens, même quand ils te déchirent le coeur en milieu morceaux. Je respire profondément pour tenter d'amoindrir cette profonde fébrilité qui me gagne. La chaleur de ton corps contre le mien est à la fois source de bien être et de confusion. Je ne sais pas quoi répondre à tes propos. "Je risque de te décevoir." Je déclare d'une voix morne et faible. Je n'ai pas cette aisance à me croire capable d'accepter ces possibilités que tu me proposes. Mon entêtement à ne pas être fragile ou trop tendre, me fera toujours défaut en dépit de toute résolution que je pourrais prendre. Et puis, tu mets un mot sur cette émotion qui nous étreint. Elle me fait trembler de mal être. L'amour ? Serait-il possible que j'éprouve de l'amour ? Mes sourcils se froncent et mon regarde rencontre le tien. Tu te ravisés, utilise un mot plus tempéré, moins fort. Cela n'efface en rien ce qui a été prononcé. Je ferme les yeux, ne commente pas et te garde juste dans mes bras. Je veux juste profiter de la chaleur apportée par ton corps et ne plus penser à rien. Cela me rend toujours plus perdu que jamais.

J'essaye de t'apporter du soutien sans savoir exactement comment me comporter, alors que le mystère reste là à planer autour de nous. Tu ne parviens pas à entreprendre un premier pas vers moi, à exprimer clairement tes sentiments. Tu dissimules ton désir, me maintenant à part de la part d'obscurité qui se loge dans ton coeur. Ton esprit s'en laisse embrumé et je ne peux rien y faire, car tu ne me laisses pas la liberté d'accéder à toutes tes pensées erronées. Je voudrais seulement calmer ta rage mais tu ne m'en donnes pas le pouvoir. Alors je me retiens à toi dans une étreinte affectueuse, pleine de douceur, pour tenter d'au moins apaiser tes nerfs. « Non je pense pas, faut juste que tu me fasses confiance. Je crois pas que ce soit si difficile. Tu sais que tu peux te reposer sur moi. » Je commente doucement en continuant de caresser ton ventre. Si seulement tu pouvais comprendre qu'avec moi, tu n'as rien à craindre.

« Ce n’est pas si simple. » Je déclare dans une voix faible et tiraillée. Je sais parfaitement qu’il ne s’agit pas d’une question de confiance. Du moins, pas en premier lieu. C’est ma fierté, le problème. Je suis un être trop orgueilleux et cela m’a toujours empêché de me laisser aller, même avec toi. C’est la source principale de toutes tes frustrations et parfois de tes blessures. Je suis comme ça, cela fait partie intégrale de moi et je peux rien faire contre ça. Seulement, je n’ai pas envie de débattre sur ce sujet, qui me chamboule au plus haut point, car au fond de mes tripes, cela me fait mal de te faire de la peine, car j’aimerai être capable de t’en préserver, d’être vraiment là, mais ouais, parfois, je suis loin d’être l’ami qu’il te faudrait. C’est sans doute pour cela que les propos de Gabriel me font tellement mal, car il détruit tout ce sentiment de perfection que je m’efforce de m’entourer pour éviter de penser à cette chienne de vie qui me ballotte sans cesse dans des merdes diverses et variées, et ce, sans fin. Alors, je me contente juste d’inspirer profondément. Les paupières closes, je préfère profiter de cette étreinte qu’on s’octroie sans penser aux vérités que ses émotions peuvent représenter. Je ne suis pas prêt pour tout ça, me semble bien incapable d’identifier leur nature. Je veux juste me sentir bien et c’est le cas à cet instant. Alors, laisse-moi juste la possibilité de lâcher prise, sans attendre quoi que ce soit, s’il te plait. Juste le temps d’un songe avant de devoir quitter cet endroit et retrouver ce monde qui m’oppresse de plus en plus.