Maybe you should... shut up ? w/ Laura M.

Qui aurait pu croire qu'un jour, moi, j'ai des amis ? Et que j'aille à des fêtes ? Personne, surtout pas ma famille. Je n'étais pas aussi bizarre que Farkoln, loin de là et il était plus facile de devenir ami avec moi qu'avec lui, mais tout de même. Comme chaque Design qui se respectait, j'avais ma petite particularité qui pouvait - ou non - faire son charme. Si pendant longtemps j'avais eu du mal avec cela, j'avais fini par en faire mon arme la plus redoutable et aujourd'hui, je comptais pas moins de 8 amis avec qui je pouvais me détendre. Enfin, si mon cerveau en était seulement capable, ce qui n'était pas le cas ! Mais franchement, à part l'alcool et peut-être la drogue, rien ne me faisait me déconnecter. Et encore, il en fallait une certaine dose...

Je sortais des cours assez tard et ne pris pas vraiment le temps de retourner à la villa pour me changer. Un petit coup de déo et de parfum suffiraient... Je n'avais pas envie de faire le chemin et me disais qu'il allait vraiment falloir que je me prenne un nouvel appartement au centre-ville de Vancouver, histoire d'avoir un pied-à-terre plus près de la fac où je pourrais me reposer sans avoir 8 frères et sœurs sur le dos. On a beau dire, même si la famille est géniale, elle peut être vachement lourde à supporter au quotidien, surtout pour un tel cerveau que moi. J'enregistre constamment tout et je suis très sensible aux moindres tensions.

Mais ce soir, fête. J'étais déjà bien en retard à cause de mon entretien avec l'un de mes professeurs en vue de le seconder, ce que j'avais parfaitement refusé. J'avais déjà eu bien de la difficulté à m'intégrer à mes camarades, alors pas la peine de chambouler tout ça en prenant un statut vu comme supérieur à celui des autres. Néanmoins, en quelques minutes, je fus arrivé à l'adresse voulu et entrais dans l'appartement de mon ami Fredrick sans même me faire remarquer. Je savais que même si je sortais tout juste des cours, j'étais quand même canon : un dénominateur commun chez les Design. Il ne nous faut pas grand chose... Un passage de main dans les cheveux noirs, on plisse un petit coup le t-shirt, le jean légèrement déchiré (effet voulu) ajusté et voilà ! Je fis la bise à tout le monde, même si je n'en connaissais pas certains. Et certaines, dont une brune toute petite avec de grands yeux. Une fois retourné vers un de mes potes, je la désignais de ma main qui tenait ma bière. "C'est qui celle-là ?" Okay, chuchoter, je ne savais pas vraiment le faire...

Je ne comptais pas rester une éternité. Le temps de boire quelques verres, parler un peu, prendre des nouvelles et je serais sur le retour. J'avais bien mieux à faire dans ma chambre que de zoner entre des personnes que je ne connaissais pas et qui, pour beaucoup, n'attiraient pas mon attention. Je pouvais peut-être profiter de ma plastique pour approcher quelques jeunes femmes, mais l'envie n'y était pas. La drague, c'était l'affaire de Ferschlyn, pas la mienne. J'étais plutôt sur la réserve concernant cette partie de la population. Disons que si j'avais le physique à conquérir, dès que j'ouvrais la bouche, elles s'endormaient ou s'enfuyaient en courant. Il faut dire que les sujets qui me passionnaient ne les intéressaient pas ou qu'elles ne les comprenaient pas. Discuter avec une femme devenait vite ennuyant de ce fait, sauf lorsqu'il s'agissait de camarades de mon cours, très peu nombreuses. J'aimais les femmes avec un peu de cerveau, de quoi orienter la conversation sur autre chose que la dernière paire de chaussure Gucci.

Tout le monde pourra s'accorder que je n'avais pas été discret en désignant la fille inconnue pas loin, qui semblait un peu toute seule dans son coin. Ce n'était en aucuns cas dans un quelconque intérêt, juste pour savoir. Pure curiosité, dira-t-on. Je n'avais aucune culpabilité quand à la façon dont je l'avais désignée. J'étais un peu gauche parfois et, là encore, je ne pensais pas avoir fait d'erreurs. Bien sûr, je me trompais. Mon pote n'eut pas le temps de répondre qu'elle s'approcha de moi pour le faire à sa place. Elle semblait ne pas avoir apprécié mon ton et encore moins mes propos, cela pouvait se voir dans sa posture et à sa tête.

"Peut-être ne cherchais-je pas à l'être ?" répondis-je tout simplement, n'arrivant pas à dire si j'étais désopilé par sa façon de me regarder ou par le ton de sa voix. "Acceptes donc mes excuses, ... ?" Je laissais un léger blanc pour qu'elle ait le loisir de me donner son prénom - ou pas. À vrai dire, comme je comptais partir bientôt, le savoir ne me serait pas vraiment utile. Une information que j'allais garder plusieurs jours dans ma tête et que j'allais me forcer à faire disparaître, par manque de place dans cette gigantesque villa qui me servait de cerveau. Quel intérêt de savoir si elle s'appelait Kathlyn, Paris ou Gorgonzola ?

"Au fait, ça t'arrive souvent d'écouter les conversations des autres et de les interrompre ? Ce n'est pas plus correct." Fis-je remarquer tout en buvant, l'air de rien. Ouai, j'avais un petit côté cassan et un peu trop sûr de lui...  

Le but n'était pas forcément d'être désagréable, emmerder les filles n'était pas ma meilleure occupation ni la plus intelligente. Mais celle-là, elle cherchait la petite bête non ? En tout cas, elle semblait pas contente sans que cela ne l'empêche de rester à mes côtés. J'avais donc des petits sourires. C'était ça, draguer ? Ou alors elle ne me draguait pas du tout et je me trompais... Comment savoir ? Je n'avais personne à mes côtés pour me renseigner sur les intentions de la demoiselle.

"Petit copain ?" C'était tout ce que j'avais retenu de son charabia. Quoi ? J'ai l'air... homosexuel ? Enfin, je n'avais rien contre les homosexuels mais de là à en être un, il y avait une grande différence. Qu'est-ce qui pouvait le faire penser ? Mon teint parfait ? Ma bouche trop pulpeuse ? Mes jambes un peu trop fines... ? Je ne comprenais pas. "Eh, je ne suis pas gay ! Et en plus, je me suis excusé il me semble. Le pardon, tu connais ?" Elle me piqua alors mon verre et j'eus un petit rire en la voyant tout recracher. Elle croyait y trouver quoi, du rhum ? Du porto ? Du citron vert ? Apparemment, j'avais la tête d'un gay irresponsable... et elle m'avait craché dessus.

"J'aime le jus de fruit" dis-je en haussant les épaules, un peu vexé. "Et je n'aime pas griller inutilement mes neurones comme ceux de ton espèce" répondis-je dans un sourire un peu provocateur. Je pris la serviette qu'elle me tendait et frottait mon haut avec une petite moue. Décidément, ce n'était pas ma soirée chance. La seule nana qui m'abordait sans me sauter dessus tâchait mes vêtements avec du jus de fruit et sa bave.

"Ce n'est pas grave... De toute façon, je n'aimais pas ce t-shirt." Fis-je avec un petit rire, tentant de détendre l'atmosphère. Est-ce que j'étais énervé ? Un peu. Je n'aimais pas provoquer ce genre de réaction : le crachat. Mais bon... Je n'allais pas la coller et lui rabâcher les oreilles avec ça comme elle m'avait saoûlé un peu avant.

"De toute façon, il sera toujours plus beau que ta robe..." Pour la délicatesse, Fantin, on repassera. C'était sorti un peu tout seul. J'essayais un peu de plaisanter sans parvenir à y arriver et au final, ça passait plus pour une insulte qu'autre chose. Sa robe n'était pas si... enfin... Avec réflexion, elle ne me plaisait pas trop. Elle ne mettait pas ses formes en valeur !  

Le sous-entendu, ma petite dame. Le sous-entendu ne m'avait pas plu, ou alors simplement m'étais-je fait des idées. Disons que la petite dame en question n'avait pas été très sympa dès le début donc difficile de croire que ses paroles puissent être un jour agréables à mon égard. Je haussais les épaules, affichant une moue qui disait "cause toujours, tu m'intéresses". Je savais que je la fâchais de la sorte mais tant pis hein... Je ne lui devais rien, surtout après le carnage qu'elle fit ensuite à mon t-shirt neuf. Presque neuf. En tout cas propre !

Elle m'amusait, cette fille. En fait, elle m'amusait autant qu'elle m'énervait et c'était rare d'accaparer autant mon attention en si peu de temps. Elle arrivait à m'agacer et à me donner envie de rire. De faire des choses. Comme mal la complimenter par exemple. Disons que je n'étais pas non plus doué pour ça ! Bref, quand elle fit un commentaire sur mes neurones, je ne pus que sourire bien évidemment vu qu'elle était loin d'imaginer le cerveau qui se trouvait devant elle, et qu'elle ne voyait pas à cause d'une simple belle plastique. Ah, les préjugés... Je n'y répondis même pas, préférant faire un petit commentaire sur sa robe. Eh, au moins, je l'avais remarqué non ?

"Rhooo faut pas prendre la mouche comme ça !" Répondis-je dans un sourire, bien plus amusé qu'elle par la situation. Il faut dire que mes propos n'avaient pas été très gentils et je m'attendais à un retour de manivelle. Peut-être allais-je devoir changer de boisson pour me préparer à la valve de méchanceté qui allait suivre...

Mais contrairement à ce que je pensais, elle n'en fit rien et détourna son attention de moi. C'était presque frustrant. Voire vexant en fait. Je n'avais pas regardé une seule fille à part elle depuis mon arrivée, ni parlé à aucune autre, mais elle me snobait comme ça ! Bien joué, il fallait le dire. Je décidais donc de reporter mon attention sur ce qui l'avait détourné de moi et levais un sourcil étonné en l'entendant parler. À qui ? Peut-être elle-même, vu le contenu...
J'en profitais pour choper un cocktail au passage, tendu par l'un de mes amis qui lui aussi, trouvait mon régime jus de fruit trop sérieux pour cette soirée. Au fond, j'avais aussi envie de prouver que j'étais viril...

"Moi qui pensais que ma présence suffisait à te rendre cette soirée sympathique..." Dis-je dans un petit rire moqueur. "C'est ta pote ? Elle ne devrait pas se rabaisser comme ça..." M'enfin, ce que j'en savais moi, hein... Je n'étais pas le frère Design le plus à même de donner des conseils en drague ou en amour, bien au contraire. J'étais celui qui en avait clairement besoin ! Dans un sourire, je posais mon regard sur ladite robe que j'avais critiqué. Si on oubliait ses propos, cette fille était plutôt jolie, même énervée. Mais comme je l'avais dit... j'étais nul en drague et ce que je pensais être une bonne excuse pour sympathiser s'avérait être énervant pour la fille en question.

De ce fait, renverser volontairement de mon cocktail à moitié bu sur le haut de sa robe n'était peut-être pas une bonne idée. Oups... Au moins, on était à égalité !  

"Bah en fait, pour être honnête, je le fais un peu exprès..." Difficile de penser que moi, Fantin Design, je sois un benêt ! Sans vouloir me vanter, bien évidemment. Seulement, on ne pouvait pas être un génie dans tous les domaines et s'il y en avait bien un sur lequel je pêchais... c'était bien celui de la drague. Non pas que je veuille draguer cette fille, mais rien que le fait de lui parler rendait la situation compliquée. Les femmes, c'était vraiment pas mon truc je crois...

J'avais fait cette "blague" pour détendre un peu le truc, nous mettre sur un même pied d'égalité mais à voir son visage, elle ne le prenait pas de la même façon. Je compris alors que j'étais peut-être allé trop loin dans le jeu de chien et chat auquel nous jouions. Néanmoins, je pensais avoir rendu service à la gente masculine de cette soirée car sous mes yeux étonnés, elle baissa sa robe jusqu'à sa taille, dévoilant soutien-gorge et donc, poitrine. J'avais déjà vu des nanas en maillots de bain ou en soutien-gorge, seulement à chaque fois je ressemblais à un nigaud quand j'en vouais une. De poitrine. Si on avait été dans un manga ou un anime, j'aurais saigné du nez. Mais à la place, j'en rougis.

Je la laissais aller se réfugier dans une des chambres en grimaçant. "Bien joué Fanfan !" m'adressa l'un de mes potes mais je ne me sentais pas non plus très fier. C'était marrant le temps d'un instant mais la culpabilité finit par pointer le bout de son nez. Et si je l'avais blessé dans son amour-propre, de façon irrécupérable ? Je ne pouvais pas être aussi méchant, j'étais persuadé de ne pas l'être. Soupirant, je finis par aller chercher deux cocktails alcoolisés et toquais à la porte de la chambre bien qu'elle m'ait dit de ne rien faire de la sorte.

"Je sais que t'en as rien à foutre de mes excuses mais je me rends compte que je suis allé trop loin. Même si tu ne me pardonnes pas, je m'excuse. Je n'avais pas à t'humilier comme ça devant les autres. C'était juste pour rire mais enfin... Je ne connais pas les limites sociales. Je peux entrer ?" Je n'attendis même pas son accord - puisque de toute façon je ne l'aurais pas - pour ouvrir la porte et entrer. Je fermais même les paupières pour ne pas la regarder, sûrement qu'elle ne le désirait pas.

"Je t'ai apporté un verre, c'était ce que tu buvais tout à l'heure je crois. Je le pose là." Pas question de le renverser une nouvelle fois...