Peu de temps après notre arrivée, on donne nos appréciations à Gabriel qui semble réclamer un avis. J'adore toujours autant ce que ce chef propose, c'est même meilleur que la dernière fois. Il s'est appliqué pour offrir une soirée élégante et gustative à ses convives. Tous les mets sont raffinés et aucun n'est pas à mon goût. Chacun se régale et commente positivement. Cela a même le don de provoquer les taquineries de Gabriel, qui charrie Erwin avec un message coquin. Cela fait encore bizarre d'apercevoir mon oncle en compagnie d'un homme - d'une autre personne, en fait. L'amour semble lui apporter beaucoup de bienfaits, et Erwin est sa bouée de sauvetage qui maintient sa tête toujours hors de l'eau. Je ne l'ai encore jamais vu agir de manière romantique, ou être en couple, alors c'est une sensation particulière. Pourtant, je n'ai aucune crainte, je sais qu'il est entre de bonnes mains avec Erwin. Et s'il lui faisait un jour du mal, Gabriel sait parfaitement que j'agirais de la même manière que lui avec Felipe quand il m'a brisé en deux. Je souris à mon tour à sa remarque, avant de plonger dans ce bonheur nouveau et de démarrer un autre sujet. On s'intéresse à Ghost, le husky dont tu t'occupes avec perfection. C'est désormais ton compagnon de vie et tu as beaucoup de choses à raconter sur lui, c'est pour cette raison que je t'incite à les transmettre. Tu expliques plusieurs anecdotes qui provoquent mon rire. Tu éclaires bien sûr nos moments de bonheur avec ce chien, comme les balades au parc ou quand il nous lèche le matin. Je ne peux pas faire autrement qu'être rempli de bonheur en ajoutant des commentaires. « C'est sûr, il trouvera toujours un moyen pour que je m'occupe de lui. Il va m'écraser de tout son poids aussi. » On s'amuse bien en parlant de nos deux animaux - nos braves bêtes qui nous attendrissent au quotidien. « Oui mais même, il n'a pas été trop craintif les premières minutes. Il l'a juste reniflé puis laissé tranquille. » Tu me regardes chaque fois que tu parles, pour te mettre en confiance. C'est déjà un grand pas même si t'observes pas le reste de ton public. Tu t'ouvres peu à peu, et je suis fier de toi. Tu ne te laisses plus surpasser par tes angoisses. C'est finalement au tour de Gabriel de commenter et de préciser sa pensée sur chaque élément. « Oui Lip le sort au moins deux heures par jour, après le boulot. Et il faut les voir ces deux-là, ils sont inséparables. » Mon oncle se met même à rire des situations évoquées et nous insulte de fainéants. Je n'ose pas lui répondre que j'ai toutes les raisons de l'être lorsque je suis au creux des bras de Felipe. Le bonheur m'envahit tellement les tripes que je ne peux pas m'empêcher de rester longtemps dans ce lit, sans vouloir quitter ni ses draps chauds, ni ses bras tout doux qui m'enserrent avec tellement d'amour. « Oui, même le dimanche on ne peut pas se reposer avec lui. Un vrai tortionnaire. Pas question de louper sa balade, il nous donne aucun répit le petit chenapan. » Je me mets à rire, râlant faussement. Ce chien est tellement adorable que c'est un plaisir de se lever pour ses besoins. Une remarque vient toutefois me chagriner, concernant le prénom choisi pour le chaton. Je ne la comprends pas. C'est peut-être aussi que tu dissimules parfaitement ton animosité et qu'elle ressort parfois. Je sens bien que ce n'est qu'une façade et que tu bouillonnes intérieurement. Pourtant, je suis le plus heureux du monde grâce aux efforts que tu fournis. « Pourquoi, tu ne l'aimes pas ce prénom ? » Je demande quand même, malgré le sentiment qu'une part de froideur n'arrive pas à être contrôlée. « Oui de vraies peluches, ils sont adorables. Ils réchauffent un peu nos vies. » Je souris à Erwin, avant de piocher un autre met. J'ignore quoi ajouter, je n'ai jamais été très bavard sur ma vie - à part quand Gabriel tente chaque fois de savoir comment s'est passée ma journée.