Meet me again +++ Thomas

Thomas&Tempérance

Meet me again

Grande inspiration silencieuse. Je fixe la silhouette à l'autre bout de la rue, imposante, grande et charismatique. Sombre. J'ai peur mais je suis excitée. Cela fait des semaines que je le cherche, que je le traque, que je tente de me remémorer son visage dans la plus parfaite précision pour mieux le retrouver. Et ça y est. Je suis certaine que c'est lui, cet homme qui ouvre la porte de son immeuble sans même imaginer que je suis tapis derrière une voiture, à l'observer comme une folle. Je guette son regard, le cœur palpitant. À chaque fois que je pense l'apercevoir, je me remémore ces souvenirs à la fois douloureux et étranges. Moi, enfermée dans cette cabane dans les bois, à attendre que chaque soir, il vienne me voir. Moi, la pauvre fille de dix-huit ans, devenue accro à chacun de nos contacts. Moi qui me rendais compte, petit à petit, que je souffrais d'affection pour une personne qui n'en avait pas pour moi, simplement... quoi, par peur ? Pour tenter de m'en sortir ? Les pistes sont nombreuses. Le psychiatre a  essayé de me l'expliquer. Ce n'est pas de l'amour, c'est de l'identification à l'agresseur. Mais ce n'est pas comme ça pour moi... Je ne le ressens pas dans ce sens. Je veux juste le voir... le sentir encore... retrouver son regard dur et excité, me battre contre lui une dernière fois.

J'attends la tombée de la nuit et une silhouette ressort du bâtiment. Je suis persuadée que c'est lui alors j'attends encore quelques minutes qu'il ne revienne pas et traverse la rue pour m'infiltrer dans le bâtiment, dont j'ai appris le code par cœur à force d'avoir observé ses occupants le composer. Je cherche la porte désirée et la déverrouille comme je le peux. Merci Google !
La porte grince un peu mais je sais qu'il n'y a personne. Il est sensé vivre seul. Je la referme derrière moi et avance dans l'obscurité, le cœur toujours aussi battant, à la recherche d'une ultime preuve. D'un souvenir de moi. Savoir s'il y pense encore ou si je n'ai été qu'une parmi tant d'autres.

Tempérance&Thomas

Meet me again

La main sur la poignée de la voiture, il s'arrête pour regarder autour de lui. Il a cette sensation étrange depuis quelque temps, une sensation qu'il n'a jamais connu ou que très rarement et qui le dérange. L'oreille aux aguets il essaie de capter chaque bruit derrière celui des feuilles bousculées par la douce brise du soir. Les sourcils froncés, il aperçoit une ombre qui bouge discrètement derrière un 4x4 gris, Tom se redresse le visage fermé prêt à faire face  à  cet individu, fait un pas dans sa direction puis... repose lentement son pied sur le bitume. Un sourire sur les lèvres il laisse échapper un petit rire moqueur à son égard. Un chat contourne le par-choc arrière pour se frotter contre la roue la queue en l'air. Il secoue la tête se sentant un peu idiot bien qu'étant conscient que dans ce monde, la méfiance est loin d'être de trop, il en est bel et bien la preuve vivante. Il appuie sur le bouton de la clé, fermant la totalité des portières de sa berline qu'il laisse devant le grand portail en fer forgé sans prendre la peine de la rentrer, reprenant la route dans peu de temps. Il compose le code sur le pavé tactile, un petit clic et le portail s'ouvre lentement sans bruit. Les mains dans les poches il patiente, un sourire sur les lèvres conscient de sa chance, de sa réussite.

Thomas franchi les deux grandes portes, avance sur le long chemin menant à cette immense villa au style ancien et pourtant actuel à la fois qui n'a rien à voir avec ces nouvelles bâtisses design sans âme. Il déverrouille la grande porte de bois massif, entre et prend soin de la fermer de nouveau en tournant la clé, un mauvais pressentiment lui intiment de le faire. Un coup d’œil à sa montre pour s’apercevoir qu'il est déjà en retard. Il monte les nombreuses marches à la hâte pour se rendre dans la salle de bain de sa chambre, actionne l'arrivée d'eau le temps pour lui de se déshabiller et se glisse sous la douche.

Les minutes défilent à grande vitesse. Tom se regarde une dernière fois dans le miroir du dressing, ajuste le nœud papillon de son second costume de la journée et quitte sa demeure avec regret, impatient d'être de retour et espérant pouvoir s'éclipser rapidement de cette petite "fête". De nouveau devant sa voiture, il regarde autour de lui, cet étrange sentiment toujours présent et un peu plus qu'il y a une heure. Il entre dans son auto, démarre et disparaît au loin dans la nuit, un œil dans le rétroviseur.

Thomas&Tempérance

Meet me again

Je prends le temps, quelques secondes, de respirer l'air de chaque pièce de cette villa. Je reconnais son odeur, celle omniprésente de la cabane qui me frappait en plein visage dès que je me réveillais, là-bas. Cette odeur est à la fois imposante, effrayante et rassurante, un mélange détonant qui me met presque en confiance. Pendant un instant, j'en oublie pourquoi je suis venue. Je me contente de me tenir debout au milieu du salon, à ressentir ce que cette pièce a vécu en la compagnie de cet homme.

Finalement, je me remets à bouger et caresse subtilement chaque meuble, chaque canapé, chaque bibelot qui croise le chemin de mes doigts. Je regarde tout dans le détail, me déplaçant d'un pas léger et presque rêveur. Je regarde le peu de choses qu'il affiche de sa vie privée, à la recherche d'une femme dont je n'aurais pas la connaissance. J'essaye de tomber sur un album souvenirs, un téléphone, un ordinateur qui pourrait me donner plus d'informations à ce sujet, mais rien. Est-ce une femme qu'il est allé retrouver ce soir ? Je ferme les yeux et prends une longue inspiration avant de reprendre mes recherches. M'énerver pour une hypothèse ne me rendra pas la tâche plus aisée.

Je me rends finalement compte qu'il ne subsiste ici aucune trace de ma présence. De notre passé ensemble. Il me croit morte et cache toutes les preuves me reliant à lui, c'est une évidence. Mais même si je le sais, ça me met en colère. Je veux être là. Je veux compter pour lui. Je veux exister.
Je finis mon parcours dans sa chambre, l'espace le plus intime selon moi. Elle est bien rangée et je ne touche à rien. Je me contente d'effleurer et sentir. Ses draps, ses oreillers, tout ce qui a son odeur de mâle. J'en frissonne. Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ?

Brusquement, j'entends des pas. Depuis combien de temps suis-je là ? Est-ce lui, déjà rentré ? Je regarde autour de moi, le cœur battant, tentant de ne pas paniquer et finis par me faire une place sous l'espace minuscule entre le lit et le sol. Là, j'attends.

Tempérance&Thomas

Meet me again

Sa patience à des limites et sourire pour les photographes se fait de plus en plus compliqué. Il garde pourtant le contrôle et tel un automate répond un Je vous en prie c'est la moindre des choses. A chaque personne qui le remercie pour ce don généreux. Vient le tour du Maire, une poignée de main qu'ils gardent en suspens pour une énième et dernière photo et Tom se faufile aussi discrètement que possible entre les invités pour disparaître à l’extérieur tandis que le gala de charité ne fait que commencer. On lui apporte sa voiture devant le grand escalier et c'est sans se faire prier après avoir donné un généreux pourboire au voiturier qu'il fonce à toute vitesse en direction de sa demeure.

Thomas traverse le hall d'entrée baigné par la douce lumière que dégage la lune à travers les immenses fenêtres. Il doit être vingt-trois heure, une des rares soirées où Tom rentre aussi tôt chez lui, une des rares fois où il est autant épuisé, où il est a même de perdre son sang froid comme il l'a fait quelques années auparavant. Il jette ses clés sur une petite table et monte les marches une à une, les jambes lourdes et le visage fermé. Ses pas raisonnent pour se perdre dans les couloirs, étrangement froids et inquiétants. Trudy n'est pas dans sa chambre, ni même ailleurs. Il se dit que finalement ce n'est pas plus mal, elle ne le verra pas dans cet état second qui lui ferai faire n importe quoi. Il ne peut plus se permettre de lâcher prise, de prendre autant de risques inutiles qui pourraient un jour se retourner contre lui.

Il ferme les portes doubles de sa chambre, les mains toujours sur les poignées il pose son front sur le bois et ferme les yeux, essayant de remettre de l'ordre dans son esprit tourmenté. Il ne lui reste qu'une chose à faire, prendre une pilule qui pourra l'aider à oublier l'espace d'un instant, s'endormir avec ses idées perverties qui l'accompagneront dans ses cauchemars et qui répondront toujours aussi présentes le matin suivant si ce n'est  un peu plus.

Tom ouvre le petit tiroir de sa table de chevet comme le ferait un homme assoiffé pour s'emparer  d'un petit flacon orange au bouchon blanc. Il sort un comprimé dans la paume de sa main, le regarde quelque instant avant d'en sortir un deuxième et de les avaler. Il défait son nœud papillon qu'il laisse tomber à ses pieds et continu avec le reste de ses vêtements qui suivent le même chemin sur le carrelage immaculé . Il se glisse dans la fraîcheur des draps dans le plus simple appareil et ferme les yeux espérant que Morphée vienne l'entourer de ses bras délicats.

Son esprit commence à devenir brumeux, les images qui ont marquées sa vie deviennent flou, sa respiration se fait plus douce et bien que ses idées ne soient plus aussi clair qu'il y a quelques minutes, une légère odeur familière vient lui chatouiller les narines. Il sait qu'elle ne lui est pas inconnue mais d'où vient t-elle ? De nouvelles images apparaissent au contact de ce parfum, des sensations. L'adrénaline, l'excitation, la peur et l'envie, le désir. Il n'arrive cependant pas à remettre le doigt dessus.  A qui appartient ce parfum envoûtant qu'il a déjà humé ? Une odeur féminine, délicate et sensuel.

Il ouvre les yeux, son coeur bat légèrement plus vite. Il sait que quelqu'un se trouve ici avec lui, dans cette pièce.  Une femme ? Il inspire profondément et se lève dans le plus grand des calmes dans le noir, oubliant sa nudité.  Aucune cachette possible dans sa chambre mis à part les portes donnant sur la salle de bain et le grand dressing qu'il ferme après un rapide coup d'oeil. La grande silhouette de Tom se dirige vers les portes coulissantes cachant de nombreux rangements, les ouvres d'un geste vif espérant le surprendre mais ne voit aucun signe d'un éventuel intrus. Ses phalanges blanchissent par la force de son poing solidement serré lorsqu'il pose les yeux sur son lit. Comment avait-il pu ne pas y penser avant ? Il s'approche, pose un genoux à  terre puis baisse la tête. Cette impression d'être suivi depuis quelques jours se révélait finalement fondée. La rage s'empare de la moindre parcelle de son corps, il tend son bras pour fermer sa main sur ce qui doit être une chevelure qu'il hisse sans peine de sous le lit pour plaquer violemment contre le mur le corps menue d'une femme. Thomas glisse son bras sous ce cou fragile, décollant ses petits  pieds à quelques centimètres du sol, son visage exposé au faisceau de lumière que dégage la grosse boule argenté dans le ciel.

Thomas relâche sa poigne, le corps tombe mollement sur le carrelage. Un pas en arrière, les yeux écarquillés, il regarde celle qu'il ne pensait plus jamais revoir pour une raison évidente : Il l'a tué. C'est en tout cas ce qu'il croyait avant de la voir sur le sol de sa chambre. Il n'avait sans doute pas fini le travail ce fameux jour et la colère monte en lui. Le visage déformé par la rage et la surprise, l'impression que le sol se dérobe sous ses pieds lui fait tourner la tête. A moins que ce ne soit les pilules ? Il regarde Tempérance dans les yeux, plus qu'hésitant sur la marche à suivre. Son corps secoué par sa respiration qu'il a du mal à contrôler, tout comme la situation actuelle, tout comme la nuit où il avait fini par emmener sa jolie rousse loin des regards indiscrets.

Thomas&Tempérance

Meet me again

La respiration courte, je finis même par la bloquer alors que la porte de la chambre s'ouvre. J'ai peine à croire qu'il soit déjà rentré et que moi, surtout, n'ai pas fait attention à l'heure. Je me retrouve bloquée ici jusqu'à ce qu'il daigne repartir - ou qu'il s'endorme. Je reconnais son pas, son odeur, sa silhouette et sa présence imposante qui hante mon esprit depuis des années. Je sais que même endormi, il pourrait ne pas me louper. J'ai passé des semaines en sa compagnie, je sais comment il est. Vif, rapide, agile. Il ne manque rien, quand il veut quelque chose. Je ferme les yeux quelques secondes, je fais le vide dans ma tête et prie pour qu'il ne me remarque pas. Pour l'instant, je l'entends marcher, s'arrêter, continuer. Il retire ses chaussures et là, le lit grince. Je mets ma main devant ma bouche pour ne pas laisser échapper un petit bruit surpris et fort heureusement, il n'a rien entendu ni sentis. La pression retombe un peu, mais pas assez pour me calmer. Je n'avais pas ressenti une telle adrénaline depuis le jour où j'ai réussi à m'enfuir du cabanon dans la forêt, pour partir de lui.

À chacun de ses mouvements, j'ai l'impression que c'est le fatal et que ma respiration est la dernière. Je ne sais pas si j'ai envie qu'il sache que je suis là, je ne sais pas si je suis prête à lui faire face. Je pense qu'il me faut encore un peu de temps. Les vêtements tombent et le poids sur le lit se fait un peu plus lourd. Finalement, il n'y a plus de bruit, juste sa respiration sur laquelle j'essaye de calquer la mienne, pour ne pas qu'il l'entende. Le silence est mon pire ennemi et j'attends qu'il s'endorme profondément pour pouvoir me glisser hors du lit. Par chance, il n'a encore rien compris de ce qui se passe dans sa chambre en cet instant et il n'y a plus qu'à prier pour qu'il en soit ainsi jusqu'à ce que j'ai passé les portes.

Pourtant, j'ai à peine bougé une mèche de cheveux que les mouvements reprennent dans le lit. J'espère que ce n'est que pour trouver une position plus confortable mais bientôt, j'aperçois ses chevilles près de mon visage. Il se lève et je bloque de nouveau ma respiration. En entendant les bruits, je comprends que ça y est, il sait que je suis là et il me cherche. Je compte les secondes qui me séparent de notre confrontation et même si je m'y attends, je ne peux pas m'empêcher d'avoir un minuscule cri surpris lorsqu'il se saisit de ma crinière pour me tirer hors du dessous de lit. Cela me fait mal mais fait palpiter d'avantage mon cœur. Je peine à distinguer les événements qui suivent. Je sens, à un moment, son bras musclé sous ma gorge et mes pieds qui pendant dans le vide. Un rayon de lune m'éblouit et je ne vois pas son visage, je ne sais pas ce qu'il ressent. Puis, brusquement, je retombe au sol.

Après avoir pris une grande inspiration doublée d'un peu de confiance en moi, je relève la tête vers lui et me redresse comme je peux. Je ne veux pas paraître faible. Je sais que je suis dans la merde, que je n'ai pas de plan B s'il décide de me tuer maintenant. De finir le travail qu'il avait commencé. Nos regards se croisent et j'attends qu'il dise quelque chose. Je peux enfin distinguer un peu mieux son visage surpris, parce qu'il me pensait morte et enterrée ou dévorée par des animaux dans cette forêt. J'essaye de ne pas voir sa nudité mais c'est bien difficile tellement elle me remémore de souvenirs, un mélange de peur et d'excitation. Ma main frôle la poignée de la porte derrière moi, prête à l'ouvrir pour m'échapper.

"On dirait que tu te souviens de moi..."